La Cac expérimente la collecte par bassin de moisson

«Collecter du maïs en bord de champ n’est pas nouveau, mais ce type d’enlèvement est d’habitude réservé aux chantiers à fort débit, note Nicolas Kress, responsable d’exploitation terrain à la coopérative agricole de céréales (Cac). À Fislis, nous l’appliquons à un bassin de moisson qui concerne 60 agriculteurs et quelque 8 000 t de collecte. » La nécessité de déménager leur plateforme vers l’extérieur du village a été le déclic.

Trois formules, une étude

Plutôt que d’investir, la coop leur a proposé trois formules au choix avec niveau de prime ad hoc : un apport direct sur silo portuaire, une livraison sur silo proche, et la délégation totale de la récolte. 5 % du volume ont été engagés sur la première, 20 % sur la deuxième et 75 % sur la troisième. « Le président et l’un de ses vice-présidents sont allés expliquer le projet sur le terrain. Ils ne sont pas étrangers à l’adhésion suscitée », souligne Élodie Richard, responsable marketing de la Cac.

La mise en place du bassin de moisson a débuté par une étude qui a eu pour but de géolocaliser les parcelles, d’apprécier leur accessibilité, de recenser l’équipement des ETA chargées de la récolte, de prendre le facteur humain en compte. « Chaque ETA a son propre fonctionnement. Le rapport à la moisson n’est pas forcément le même pour un agriculteur à l’esprit gestionnaire ou pour un double-actif », note Élodie Richard. « La priorité est de programmer d’abord les parcelles qui doivent être libérées pour les semis de blé », note Nicolas Kress. Il a vu de ses yeux chaque parcelle. Il coordonne l’intervention des prestataires et gère le planning. « Le travail devient confortable quand on dispose d’une prévision pour les sept à dix jours à venir. » Les ETA comme les transporteurs ont été équipés en tablettes avec le logiciel Farm Pilot, rapidement devenu indispensable. « Les chauffeurs savent en permanence où en est chaque maillon de la chaîne de récolte. Si un camion est par exemple bloqué par la circulation, le pilote de la moissonneuse peut récolter les coins de parcelles qui demandent plus de manœuvres. À l’inverse, si le camion arrive rapidement, il peut décider de faucher de grandes lignes pour pouvoir charger sans temps mort. C’est un vrai gain de temps. Au final, c’est moins de stress et une meilleure organisation du travail pour tous les intervenants », raconte Nicolas Kress.

Pas plus cher, voire moins

La coop s’appuie ainsi sur un système qui facilite la vie des participants aux chantiers et libère du temps aux agriculteurs. Elle se fixe une jauge d’hectares à rentrer par jour. Elle peut mieux réguler l’activité de certains de ses silos, mieux gérer le risque mycotoxines en traitant plus rapidement certains lots. En termes de coût, « la récolte par bassin de moisson ne revient pas plus cher que le modèle classique de livraison au silo. Dans certains cas, elle est même moins cher. » Le principe est de répercuter aux adhérents les économies réalisées sur les coûts d’intermédiation. Ceux qui ont opté pour la délégation totale de récolte touchent une prime de 2 €/t de maïs sec.

Les deux années de recul ne se traduiront pas par de gros changements en 2021. La Cac n’a pas prévu d’augmenter le nombre de participants au bassin de Fislis car ce ne serait que « déshabiller Pierre pour habiller Paul ». Elle essayera tout de même de motiver les ETA pour qu’elles battent plus de tonnes à l’heure. Aucun nouveau bassin de moisson ne doit être créé dans l’immédiat. « Il n’est pas question d’appliquer ce modèle à l’échelle de notre zone d’intervention, prévient Élodie Richard. C’est une solution opportune dans certaines situations. Il peut s’agir d’une zone géographique mais aussi, pourquoi pas, d’une filière comme le bio. C’est pourquoi elle doit figurer dans l’offre à nos adhérents. »

Christophe Reibel