Charpentier encourage ses clients à produire autrement

Sensible depuis longtemps à la réduction des intrants, le négoce Charpentier a souvent fait figure de précurseur dans l'emploi de techniques de production alternatives. « La Pac de 1992 a été pour nous un déclic, explique Francis Charpentier qui dirige avec son frère Jean-Jacques, l'entreprise familiale de Beauquesne, près d'Amiens, dans la Somme. Les agriculteurs voulaient réduire l'impact économique des intrants dans le compte de leurs exploitations. Nous avons cherché à leur apporter des réponses et depuis, c'est un sujet sur lequel nous avons toujours travaillé. »

Prendre en compte la vie du sol

Fertilisation bactérienne, azote foliaire, stimulation foliaire, dynamique du sol, qualité de l'eau, rotation au service de l'agronomie, valorisation des déchets animaux et végétaux, intérêt du déchaumage, non-labour, semis direct, biocontrôle... Autant de solutions déjà mises en place ou de pistes évoquées que l'on n'a pas l'habitude d'entendre de la bouche d'un distributeur. Charpentier travaille sur ces sujets depuis longtemps avec des fournisseurs comme Xurian ou Fleurdelyse, ou avec l'appui d'instituts comme le centre de recherche de Gembloux en Belgique. En plus de la compilation des essais réalisés dans le cadre du groupe Clef, il met en place à titre personnel des expérimentations comme l'essai sur cinq ans qu'il a démarré l'an dernier, sur la réduction de la fertilisation P et K.

Aujourd'hui, Charpentier encourage ses clients agriculteurs à se regrouper en GIEE, groupements d'intérêt économique et environnemental, autour de thèmes particuliers. « Nous souhaitons les inciter à prendre encore mieux en compte la vie du sol et à continuer à progresser dans la réduction des intrants, précise Nicolas Charpentier, un des membres de la 4e génération de Charpentier dans l'entreprise, qui a lui aussi pris le sujet à bras-le-corps. « Ce qui nous paraît intéressant dans la formation d'un GIEE, c'est le travail en groupe, il y a plus d'idées dans plusieurs têtes que dans une seule, souligne Sophie Delporte, assistante commerciale qui est entrée chez le négociant, après y avoir effectué un mémoire de fin d'études sur le thème « comment aider les techniciens à s'approprier et à proposer les réductions d'intrants et les produits de biocontrôle ». « C'est aussi de pouvoir tester différentes pistes chez les agriculteurs, de progresser en partageant les expériences, et ainsi de faire éclore par les échanges, de belles initiatives, précise Francis Charpentier. La constitution d'un GIEE est également une opportunité pour récupérer une partie des aides Pac qui sont dirigées vers le deuxième pilier. »

Première rencontre de sensibilisation

Pour sensibiliser les agriculteurs à la démarche, Charpentier a organisé une journée de rencontre avec les agriculteurs sur le sujet avec l'appui de Stéphane Hochard, animateur du GIE agriculture conseil et environnement, et le concours de nombreux intervenants de la Draaf, chambre d'agriculture, institut Lasalle Beauvais, Paraclet... Cette première rencontre a permis de réunir une cinquantaine d'agriculteurs. Le négociant va à nouveau contacter ses clients cet automne pour lancer la démarche. « Notre souhait à terme est d'inciter à la création d'une dizaine ou d'une quinzaine de GIEE que nous pourrions appeler des clubs, ajoute le directeur du négoce. Notre objectif n'est pas de passer au bio, mais d'aider les agriculteurs à trouver un équilibre entre le tout bio et le tout engrais-phytos en utilisant une large de gamme de biocontrôle. »

Blandine cailliez