VU À L'ÉTRANGER Kaap Agri : changer de statut pour se développer

La culture du blé étant en régression au profit du maïs, de la canne à sucre et du soja, Kaap Agri, entreprise de services et de collecte créée en 1902 à Malmesbury près du Cap, a dû profondément revoir son business plan au début des années quatre-vingt-dix. Compenser une activité agricole en forte baisse, rechercher de nouvelles valeurs ajoutées et élargir le portefeuille clients, ont été les axes du nouveau développement. Une nouvelle orientation stratégique se dessine alors : se spécialiser dans les magasins de proximité, type Gamm vert.

Une entrée en bourse dans les cinq ans à venir

Cela a nécessité de nombreux investissements que la coopérative Kaap Agri ne pouvait assumer seule. Elle a trouvé en Zeder Investments Limited, un partenaire de choix, qui a proposé au conseil d'administration de l'époque d'acheter une proportion significative de parts de la coopérative. Une fois la barre des 20 % passée, le processus a continué et la coopérative a perdu son statut pour devenir une société anonyme.

Aujourd'hui, Zeder possède 35 % des parts, en les ayant progressivement racheté aux agriculteurs. Le reste est détenu, en majorité, par d'autres investisseurs étrangers à l'agriculture, et le personnel. Quelques agriculteurs ont gardé leurs actions. Bien leur en a pris puisque la valeur a été multipliée par trente en seize ans. Et l'entreprise pense entrer en bourse dans les cinq ans à venir. L'activité jardinerie a connu une forte réussite. Elle représente aujourd'hui 80 % du chiffre d'affaires du groupe, et dispose de 163 magasins, situés essentiellement dans des zones urbaines et pouvant ainsi attirer d'autres clients.

80 % du CA en jardinerie

« On trouve dans nos magasins AgriMark des produits de jardinerie, des vêtements, du loisir et depuis maintenant quatre ans des aliments. Une activité matériels agricoles et de jardinage est aussi présente », déclare Johan de Lange, directeur commercial de Kaap Agri. « Nous ne vendons plus d'engrais, ni de produits de protection des cultures, sauf en petit packaging dans nos magasins de proximité. Ce sont des marchés matures où il existe de très nombreuses petites entreprises concurrentes. Dans notre zone géographique, on en compte trente-sept. Les marges sont devenues trop faibles, précise Johan de Lange. Kaap Agri ne travaille que sur le blé. Nous sommes collecteurs et revendeurs de semences certifiées de Sensako, leader des semences de céréales à paille. Nous avons aussi une activité de conseils en culture. » En 2015, 322 000 t ont été collectées dans quatorze silos, sur les 1,6 Mt produites dans le pays.

Conseils sur la vente de blé

« Nous donnons aussi des conseils sur la vente, annonce le trader Cobus du Plessis. Ce n'est pas facile dans notre région car sur le prix de marché, il faut soustraire systématiquement 560 rands (35 €) de logistique toute la collecte étant achetée par les meuniers qui ont leurs moulins proches de Johannesburg à 1 400 km du Cap et qui comptent systématiquement le prix du transport lors de l'achat. » Un transport qui se fait essentiellement par camion ou par barge via Durban, « la SNCF locale est déplorable », se lamente le trader. Sur cette activité, Cobus du Plessis et Johan de Lange, comme les agriculteurs, vivent une seconde année difficile puisque la sécheresse de 2015 a fait baisser la collecte de plus de 30 %. L'Afrique du Sud traditionnellement importatrice de blé, le sera encore plus cette année.

Les cours ont explosé allant jusqu'à 4 800 rands/t (290,62 €). Une bonne nouvelle pour les quelques rares agriculteurs qui ont réussi à produire plus de 1,5 t/ha, soit le coût de revient. « Seul aspect positif pour nous, se réjouit Cobus du Plessis, avec de tels cours, les promesses d'engagement de semis de blé sont en hausse pour la prochaine campagne. » L'ensemble de l'Afrique du Sud retient son souffle en attendant les pluies des prochains mois qui seront déterminantes pour la réussite de la prochaine campagne.

Christophe Dequidt