TRITURATION Des outils qui font tache d’huile

Après Ucal Stockage et Protéines en 2022 dans l’Allier, calibrée pour transformer 30 000 t par an de graines oléagineuses, c’est au tour de deux outils d’être rendus opérationnels coup sur coup en Auvergne-Rhône-Alpes. L’unité Nutralp, portée à parts égales par trois coopératives, Bresse Mâconnais, Capdis et Jura Mont-Blanc, et d’une capacité de 15 000 t, a trituré ses premières tonnes de graines locales de colza, soja et tournesol, mi-février à Bâgé-Dommartin (Ain) ; et l’usine de trituration d’Oxyane (25 000 t, dont 20 % de bio), située à La Côte-Saint-André (Isère) et dédiée à la transformation du soja, tourne à plein depuis fin juin. Ensemble, les trois outils offriront donc un débouché à 70 000 t de graines (soit environ 45 000 t de tourteaux et 25 Ml d’huile).

Moins de tourteaux importés

En triturant les trois graines, dont la proportion pourra varier d’une année à l’autre, Nutralp s’offre une certaine flexibilité, mais le soja est particulièrement recherché pour sa haute teneur en protéines. L’huile représente la majorité du volume et du chiffre d’affaires, elle est vendue sur le marché national, avant peut-être de trouver un débouché local à plus haute valeur ajoutée. Mais le but premier est d’approvisionner en tourteaux les deux usines d’aliments détenues par les coopératives (JMB et UBRS). « Nous espérons passer de 75 % de tourteaux importés à moins de 25 % », explique Thomas Aubry, directeur de Nutralp et de la coopérative Bresse Mâconnais. Le tourteau produit devrait être compétitif par rapport au tourteau non OGM, recherché par les filières d’élevage AOP de la région. Du tourteau OGM restera importé afin de produire un aliment à prix compétitif pour les filières animales moins bien valorisées.

Chez Oxyane, détaille Grégory Pinçon, directeur de l’activité élevage, « l’unité produira, pour une tonne de soja, 750 kg de tourteau expeller, 50 kg de coque que nous utiliserons aussi en nutrition animale, et 100 kg d’huile. » Mais pas question de brader cette dernière : pour cibler les bons marchés, Oxyane s’est assuré le concours d’un expert en nouant un partenariat avec le groupe Avril.

Concurrence pour le soja ?

À voir comment les deux outils, situés à 130 kilomètres à vol d’oiseau l’un de l’autre, vont fonctionner sans se marcher sur les pieds, alors que leurs zones de chalandise se recoupent. C’est surtout concernant le sourcing en soja qu’ils risquent de se concurrencer… « Nous avons déjà 6 500 ha contractualisés en soja : il nous manque 1 500 ha, qui seront atteints grâce aux intérêts économiques et agronomiques de cette culture », assure pourtant Jean-Yves Colomb, président d’Oxyane. Chez Nutralp, qui valorisera chaque année 5 000 ha d’oléagineux, on est également convaincu que les agriculteurs sèmeront davantage de graines, car les problématiques agronomiques incitent à diversifier les assolements. En tout cas, pour cette première demi-campagne, les besoins ont été largement couverts par les 9 000 t collectées (50 % colza, 25 % de soja et 25 % de tournesol).

C’est aussi toute l’ambition du consortium Coopéara, constitué sous l’impulsion de La Coopération agricole Auvergne-Rhône-Alpes, que de faciliter l’approvisionnement de ces outils en graines oléagineuses et de valoriser les tourteaux produits dans les filières régionales. Bref, construire une filière où chacun trouve son compte, du producteur de semences à l’éleveur, avec des prix acceptables par chaque maillon.