Appro-collecte Les poids lourds doivent rassurer
Difficile aujourd'hui pour les coopératives et les négoces de concilier puissance et proximité. Bien souvent sur le terrain, les conséquences des multiples unions, fusions et rachats sont difficiles à percevoir, mais pour relever le défi de la compétitivité, ces mouvements sont bien souvent incontournables.
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Les regroupements continuent d'aller bon train, les rachats aussi. En 2010, les plus marquants sont à la mesure du secteur appro-collecte : la fusion de Coopagri, Eolys (Finistère) et Cam (Morbihan) donne Triskalia, Capafrance (Val-d'Oise), Force 5 et Oceal (Oise) fusionnent au sein d'Agora, Champagne céréales absorbe le négoce Compas… Et ça bouge également dans les réseaux de négociants. Négoce 253 (18 entreprises des Pays de la Loire et de Basse-Normandie) se retrouve dans D'Clic, Agrosud (15 négoces) rejoint Symphonie qui s'affiche, désormais, comme le premier réseau de négociants français, avec 228 M€ de chiffre d'affaires appro grandes cultures et cultures spécialisées (voir infographie)… " Les lignes ont réellement bougé malgré les nombreuses crises ", constate Yves Le Morvan, DG de Coop de France. Quinze coopératives franchissent la barre du milliard d'euros de chiffre d'affaires, soit le double en dix ans. Le périmètre coopératif progresse de 5 % en 2010, avec un chiffre d'affaires global (filiales comprises) de 82,4 milliards d'euros. Et Philippe Mangin, président de Coop de France, d'annoncer encore " beaucoup de projets en maturation dans les mois qui viennent ".
Demain, cinq à six groupes régionaux
Mais qu'est ce qui fait courir les entreprises dans cette course à la taille ? Peser sur les marchés et relever le défi de la compétitivité, tels sont les enjeux majeurs. La taille est indispensable si l'on veut jouer dans la cour des grands, notamment à l'export… " Dans la réalité mondiale, c'est le poids qui fait la force, rappelait Jean-Marc Bournigal, directeur du cabinet du ministre de l'Agriculture, lors du dernier congrès de Coop de France. En France, le paysage agricole est bien trop morcelé. " En attendant, on perd des positions et on prend du retard. Ainsi, dans le top 15 des groupes coopératifs européens, le premier Français InVivo émarge seulement à la 6e place, suivi de Sodiaal (10e), Terrena (13e), Tereos (14e), Axéréal (15e).
Toutefois, Philippe Mangin, prévient qu'en céréales, cinq à six groupes régionaux sont en train de se constituer. Dans le secteur de l'élevage, nous ne sommes pas au bout. Il faut aller plus vite et plus loin. " L'émergence de poids lourds n'est pas finie, mais ces mouvements ne font pas, pour autant, table rase du tissu coopératif. " Nous devons faire émerger des leaders et avoir des coops moyennes pour répondre à la segmentation des marchés. " Sachant qu'il n'y a pas que la taille qui compte. Pas besoin d'être un géant pour peser sur les marchés. " Sur des niches, une petite coop entre 20 et 50 M€ de CA, avec une bonne situation financière, peut s'en sortir ", note René Mauget, professeur à l'Essec Business School. En dessous, selon lui, elles ne peuvent pas attirer les compétences et investir.
On constate aussi que les structures régionales polyvalentes sont les moins fragiles. D'où les nouvelles orientations prises dernièrement dans le secteur de l'élevage par les grosses structures céréalières (comme Champagne céréales). " Les structures régionales spécialisées peuvent tenir, mais il y aura encore du mouvement, prédit également René Mauget. Quant aux structures départementales spécialisées ou polyvalentes, elles vont bouger et la concentration va continuer, car elles sont trop peu dans la transformation. "
Des efforts de communication
Mais au final, à qui profite le développement de ces poids lourds ? Les agriculteurs notamment ne voient pas forcément tout cela d'un bon oeil (lire p. 26). Pour convaincre et rassurer les partenaires de l'amont et de l'aval, des efforts de communication s'imposent. Certains y travaillent (lire p. 28). Agridis remet ainsi " l'agriculteur au centre de sa stratégie ", atteste Jean-Guy Lelu, président du réseau de négociants. De son côté, la coopération s'attache à développer une " meilleure gouvernance plus tournée vers les adhérents, et au service d'un management réactif et de stratégies de développement ambitieuses. " Car demain, le véritable enjeu sera de défendre le lien entre matière première et outil industriel de transformation. Un lien qui devient complexe et de plus en plus lourd pour les agriculteurs. Il faudra savoir conjuguer puissance et proximité. Une équation complexe à résoudre.
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