Lisa et jardineries Ça pousse !
Dans un marché du jardin mature, les enseignes des Lisa et jardineries portées par les coopératives et négoces sont toutes au taquet pour conquérir de nouveaux membres dans leurs réseaux, tout en s'adaptant aux enjeux réglementaires et sociétaux du jour.
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S'il y a bien une activité qui semble se développer ces dernières années, c'est celle des Lisa et jardineries, à observer l'évolution du chiffre d'affaires des ventes pour trois des quatre enseignes issues du secteur agricole (voir infographie). Et ce, dans un marché du jardin arrivé à maturité et affichant une croissance zéro en 2016 tout comme en 2013 (source Promojardin). « Nous sommes dans un marché du jardin mature avec une banalisation de l'offre faite par les généralistes : les grandes surfaces alimentaires et de bricolage et les sites web. Ce sont eux nos vrais concurrents sur le tandem produit-prix », remarque Jean-Pierre Dassieu, directeur d'InVivo Retail. L'union coopérative espère renouer avec une croissance de 3 à 4 % pour Gamm vert, contre les 1 à 2 % actuels, en étoffant, entre autres, son réseau de dix à vingt magasins par an (lire p. 28). Les autres réseaux, Apex avec Point Vert et Magasin Vert (p. 30), Inédis (p. 29), portant l'enseigne France Rurale, ou encore Kiriel (p. 31), cherchent également à consolider leurs bases dans un marché dont l'arrivée à maturité complique la tâche. Tout ceci en tablant sur la croissance interne et externe à partir des coopératives et négoces, entreprises à l'origine de ces enseignes, mais aussi à partir d'indépendants, comme les horticulteurs ou d'autres hors secteur agicole, qui sont devenus un creuset de croissance. Trois centrales d'achat alimentent aujourd'hui les réseaux : deux d'origine coopérative, celle d'InVivo et Apex et une privée, Inédis. Quant à l'enseigne Kiriel, elle réalise depuis 2008, 70 % de ses achats auprès d'Inédis tout en restant totalement autonome sur la gestion de son réseau.
Lisser le chiffre d'affaires
Dans le monde de la coopération ou du négoce, les structures qui naviguent seules sans réseau se font de plus en plus rares. Certaines choisissent toutefois de reprendre leur indépendance comme le négoce Bernard dans l'Ain, qui a quitté France Rurale l'an dernier, afin de « négocier directement avec les fournisseurs, être plus proche de la demande des clients et donc plus réactif, porter notre gamme en aliments et granulés bois et mettre en place notre propre politique marketing », détaille Eve Collet, responsable marketing du groupe Bernard. Ce négociant a d'ailleurs créé cette année une nouvelle identité pour ses magasins, « Bernard côté boutique » et projette de mettre en place un magasin par dépôt agricole, soit une douzaine de boutiques. Leurs deux gammes dominantes sont le jardin, les aliments et l'équipement animal complété notamment par du bricolage pour lisser le chiffre d'affaires. Lisser le chiffre d'affaires sur l'année, tout en palliant les aléas climatiques, est d'ailleurs un des enjeux de ces Lisa et jardineries. C'est pourquoi un rayon comme l'alimentaire se développe pour renforcer le flux de clientèle dans les points de vente et apporter de la valeur ajoutée aux producteurs dont les produits sont commercialisés. Les magasins qui en font l'expérience en sortent gagnants. Pour exemple, Unicor va installer de nouveaux corners Petites Halles (p. 26) et InVivo compte développer son enseigne alimentaire Frais d'ici avec des espaces dédiés dans les Gamm vert. D'autres entreprises lancent de nouveaux partenariats comme le groupe Cavac qui va ouvrir en septembre un troisième espace La Vie Claire dans le sillage d'un Gamm vert. Le choix d'une enseigne spécialiste du bio s'inscrit dans la lignée de l'engagement du groupe vendéen dans la filière bio avec les rachats de BioFournil et BioPorc. « Nous sommes au-dessus de nos objectifs de chiffre d'affaires dans les deux premiers magasins, avec une nette hausse de leur fréquentation », commente Cécile Pagès, directrice de Cavac Distribution. Selon le bilan de ces magasins pilotes, d'autres pourraient suivre dans deux ou trois ans. Cependant, l'alimentaire n'est pas la panacée de tous. Le groupe Inédis préfère investir un nouvel univers comme la pêche qui est testé dans deux de ses succursales et a lancé parallèlement une nouvelle marque pour rallier les commerçants spécialisés dans ce secteur. Chaque enseigne cherche en fait à s'adapter aux attentes actuelles, à faire venir de la clientèle, et à étendre ses zones de chalandise. C'est dans cet esprit que la digitalisation gagne du terrain avec notamment des sites de vente en ligne chez Gamm vert et Inédis et une réflexion à ce sujet chez Kiriel. Dans les territoires ruraux, la question du renouvellement des générations se pose, comme le souligne Florence Vacher gérant deux Lisa dans le Puy-de-Dôme (p. 29).
Le devenir du jardin
Autre évolution, les rayons s'enrichissent dans le domaine de l'habillement avec des vêtements de randonnée comme chez Gamm vert, ou encore avec de la décoration et des serres chaudes. D'autre part, l'urbanisation croissante induit la question du devenir du jardin. Quelle sera sa forme, sa taille ? Les petits jardins d'intérieur pourraient se développer. InVivo Retail a d'ailleurs lancé toute une gamme via sa filiale Néodis avec des contenants au design moderne et élégant pour cultiver aromates, tomates cerises et fraises en intérieur et toute une panoplie pour faciliter la culture en balcon et terrasse. La végétalisation des constructions va aussi se développer. L'activité de compostage est appelée également à prendre de l'ampleur avec toutefois une vigilance sanitaire à avoir. « Nous saurons évoluer et nous organiser. Nous avons la volonté d'accompagner le changement, souligne Guillaume Roth, président de l'UPJ (Union des entreprises pour la protection des jardins et des espaces publics) et directeur général de Scott (p. 24). Le marché du jardin va vraiment changer dans les dix prochaines années. »
L'autoproduction en vogue
Le « manger local tout en sécurité » inspire aussi les choix des enseignes. L'autoproduction, principe même du potager, devient le fer de lance de la stratégie de Gamm vert qui veut le marqueter très lisiblement dans ses magasins avec sa démarche Magasin 2020. A cela vient se greffer l'enjeu du changement que génère l'interdiction au 1er janvier 2019 de l'utilisation (et donc de la vente) par les particuliers de tout produit phyto conventionnel. En attendant, ces produits ont dû être mis sous clé pour les vendre uniquement avec un conseiller. Mais les fournisseurs, par la voix de Guillaume Roth, annoncent ne pas détenir toutes les solutions de remplacement à l'échéance prévue. Cependant, chaque enseigne et point de vente s'y prépare par l'évolution des offres et la formation du personnel, tout en ayant conscience du travail de pédagogie à réaliser auprès de la clientèle plus traditionnelle. De son côté, le négoce Bernard a pris le problème à bras-le-corps et recherche avec les fournisseurs de son activité agricole de nouvelles solutions pour les jardins, forme les équipes et élabore des fiches conseils tout en harmonisant la communication dans ses boutiques. Les Lisa d'origine ont bien évolué.
DOSSIER RÉALISÉ PAR HÉLÈNE LAURANDEL
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