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L'agroécologie Tout le monde en parle...

Entre le projet du ministre et sa définition dans la loi d'avenir, l'agroécologie est sur toutes les lèvres. D'après notre enquête, elle serait déjà une réalité. Huit acteurs de la filière, au sens large, nous ont apporté leur éclairage sur une notion aux contours flous, même si des critères sont en cours de définition.

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A force d'être rebattu, le terme d'agroécologie fini chez certains par susciter des réactions épidermiques. Il faut dire que depuis le lancement le 18 décembre 2012 du projet, le pays semble pris d'une frénésie agroécologique, particulièrement palpable lors du dernier Salon de l'agriculture fin février. De la visite pédagogique de la ferme agroécologique du ministère de l'Agriculture pour les enfants, à la charte qualité agroécologique de McDonald's, en passant par les articles de la presse grand public, comme « L'agroécologie sur-le-champ » paru dans Libération, le 17 février, ou encore « L'agroécologie, nouveau dada des scientifiques », dans 20 minutes, le 24 février... L'agroécologie est partout. Pourtant, la démarche reste nébuleuse et chacun voit midi à sa porte (lire nos huit témoignages p. 28 à 33).

L'agroécologie a été définie dans le projet de loi d'avenir agricole qui doit être examiné au Sénat en avril. Ce sont des systèmes qui « privilégient l'autonomie des exploitations agricoles et l'amélioration de leur compétitivité », en diminuant la consommation d'énergie, d'eau et d'intrants. Une définition qui reprend la double performance économique et environnementale, au coeur du projet du ministre de l'Agriculture.

Entre pratiques agricoles, science et mouvement social

L'agroécologie ne date pas d'hier, comme l'explique l'Inra, « depuis les années soixante, l'agroécologie est un terme utilisé pour désigner des pratiques agricoles mobilisant les régulations écologiques, ainsi qu'un mouvement social face à l'industrialisation de l'agriculture. Dans le monde de la recherche, c'est une discipline scientifique émergente qui a pour ambition de conjuguer les sciences agronomiques et l'écologie ». Portée sur le devant de la scène par le gouvernement, l'agroécologie ne fait pas l'unanimité. Nicolas Dhuicq, député de l'Aube, l'a qualifiée de « retour au post-néolithique », lors des débats de la loi d'avenir. François Veillerette, de l'ONG Générations futures, estime que « tout le monde peut se retrouver dans cette définition, mais le projet ne fait pas avancer les gens. On reste sur notre faim quant aux moyens mis en oeuvre et aux objectifs ». Marc Dufumier, de son côté, juge que « d'un point de vue technique, c'est une vraie révolution, c'est un virage à 90 degrés ». Il insiste sur la nécessité de créer des conditions économiques favorables pour les producteurs, et de composer avec la Pac, dont les mesures sont « insuffisantes » pour assurer la réussite du projet. « La méthanisation est une fausse bonne idée », ajoute-il.

En tout cas, d'après notre enquête (voir ci-dessus), l'agroécologie serait déjà en marche dans les campagnes. Et là aussi, les réactions divergent sur l'interprétation des résultats. Pour Christophe Grison, président de Farre, le chiffre de 87 % d'agroécologues, « reflète la réalité terrain. Il y a eu un vrai changement, à mettre en lien avec le renouvellement des générations ». A contrario, Marc Dufumier réagit : « Je comprends pourquoi les agriculteurs ont répondu ça, mais je n'y crois pas un seul instant. Notre agriculture industrielle est loin d'être une agriculture agroécologique. » Tout comme François Veillerette : « Les répondants sont sans doute parfaitement de bonne foi, mais cela nous montre bien que la définition est faible. En l'absence d'indicateurs, on peut estimer que l'on a des pratiques agroécologiques. » Pour lui, les réponses à la deuxième question, sur l'accompagnement, confirment cette vision, avec seulement 12 % répondant "Les agriculteurs eux-mêmes". « Cela montre bien que la grande majorité des agriculteurs savent que les compétences ne sont pas chez eux. » Sur ce sujet, la distribution agricole est attendue. Elle arrive en tête des meilleurs partenaires pour la mise en place de pratiques agroécologiques. Comme le déclare Guilhem Brun, à la DGPAAT, en page 28 : « On a absolument besoin des coopératives et des négoces dans ce projet. »

DOSSIER RÉALISÉ PAR MARION COISNE

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