Nutrition animale La maîtrise des risques
De la sécurité, prévention des débouchés, de la qualité et de l'outil industriel, à la sûreté, protection contre des actes volontaires malveillants, l'industrie de l'alimentation animale décline sa propre analyse des risques. Objectif : survivre.
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«En 2012, le revenu moyen des exploitations agricoles s'élève à 38 300 € par actif (...) le revenu atteint son niveau historiquement le plus élevé. » Le début de la note Agreste Primeur de juillet 2013, consacrée à l'analyse des revenus agricoles 2012, annonce de bonnes nouvelles. La suite tempère l'enthousiasme, car les grandes cultures affichent 76 500 € en moyenne par actif non salarié contre 39 000 € pour les élevages avicoles et porcins (17 000 € en ovins...). Sans oublier que ce n'est pas parce qu'un éleveur affiche une augmentation de son résultat que son atelier élevage va bien. Nombre d'exploitations combinent en effet productions animales et productions végétales.
Les encours se dégradent
D'ailleurs, les encours, critère clé du suivi de l'état financier des élevages, se dégradent. En production porcine, les retards de paiements sur les livraisons d'aliments atteignaient 10 % du chiffre d'affaires des fabricants fin octobre 2012, dont 35 % d'encours jugés particulièrement préoccupants. Toutes les filières non intégrées notent la même évolution. « Dans les filières organisées, l'augmentation du prix des aliments est répercutée sur le prix de reprise donc la trésorerie de l'éleveur ne souffre pas. Mais pour les autres, comme le bovin lait ou le bovin viande, les encours se dégradent, explique Jean-Louis Zwick, chez Maisadour. Si les achats progressent en volume ce n'est pas parce que les élevages disposent de trésorerie, mais parce qu'ils manquent de ressources fourragères ou qu'ils achètent des aliments au lieu de soja en raison des cours élevés des matières premières. » Inquiétant, non seulement car ces encours pèsent sur des marges évanescentes des fabricants d'aliments, mais aussi car ils font craindre l'abandon du secteur par les banques. Et les volumes d'aliments suivent : même si la baisse semble somme toute ralentie (- 0,2 % toutes espèces confondues sur les onze premiers mois de la campagne 2012-2013), la hausse des aliments pour bovins (+ 4,6 % en vaches laitières et + 3,6 % en mash) compense à peine la chute des aliments pour porcs (- 2,4 %), les aliments pour volailles s'équilibrant entre espèces (hausse des pondeuses et des poulets, baisse des dindes et des palmipèdes). En Bretagne, l'année 2012 a été marquée par un recul de 2,7 % des aliments complets pour les porcs charcutiers. La question même de la survie est posée et la suppression totale des restitutions pour l'exportation de poulets, annoncée par la Commission européenne le 18 juillet, n'arrange rien.
« Pour le secteur de la nutrition animale, la filière grand export est essentielle. Elle représente une production annuelle de 700 000 t d'aliments composés, concentrée sur les régions Bretagne et Pays de la Loire », rappelle le Snia.
Levée de boucliers anti-Commission européenne
Les instances interprofessionnelles ont évidemment réagi le jour même que ce soit le CFA (confédération française de l'aviculture) le CIPC (poulet) ou le Cidef (dinde). Ce dernier rappelle que « la conférence régionale avicole et le plan stratégique du gouvernement avaient pourtant souligné l'importance de l'activité Poulet grand export pour consolider la compétitivité globale des productions avicoles françaises », et le président du CIPC, Jean-Yves Ménard parle de « cadeau fait au Brésil ». Toute l'aviculture se tourne vers le ministère de l'Agriculture qui, de son côté, s'étonne : « Rien ne justifie cette décision brutale. » Rien, ni du côté économique, ni du côté politique : le marché international du poulet congelé se dégrade, le réal brésilien baisse face à l'euro, et le compromis adopté fin juin sur la réforme de la Pac prévoyait des modifications lors de son entrée en vigueur. Les opérateurs sont sonnés. Même s'ils savaient cette fin inéluctable, ils l'attendaient au pire pour le 1er janvier 2015. L'adaptation est engagée, mais prendra du temps, ne serait-ce que pour la rentabilité des 21 M€ investis parTilly Sabco dans son unité de Guerlesquin (Finistère).
Et qu'en sera-t-il de sa proposition de reprise, pour 55 M€, des usines de Châteaulin (Finistère) et de Chantonnay (Vendée) appartenant à Doux, l'autre spécialiste du grand export en se finançant, notamment, par uneaugmentation de capital qui semble intéresser Sofiprotéol ? En attendant, l'entreprise a suspendu ses achats en juillet en engageant une action en référé contre la Commission européenne...
DOSSIER RÉALISÉ PAR YANNE BOLOH
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La maîtrise des risques
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