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TC Vos clients sont satisfaits mais...

Globalement satisfaits selon notre enquête ADquation-Agrodistribution, les agriculteurs tiennent à leur technico-commercial, et la relation de confiance prime toujours. Mais la diversification des typologies d'agriculteurs implique d'être d'autant plus vigilant dans un contexte de crise.

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La perception de la mission du technico-commercial est en pleine mutation. Né dans les années soixante sous l'impulsion du ministère d'Edgard Pisani et du gouvernement du général de Gaulle, le métier de technicien de production agricole avait alors pour vocation d'aider les agriculteurs à tripler leur productivité à l'hectare dans les vingt-cinq ans à venir, afin que la France conquière son autonomie alimentaire. Cette mission première a bien évolué depuis, ainsi que le contexte agricole. Comme le souligne Alain Baraton, formateur consultant, " le drame pour la profession de TC repose sur le fait que jusqu'au début des années quatre-vingt-dix, elle était financée pour moitié de la masse salariale par un jeu de subventions transitant par la région ".

Puis, la donne change et l'acte commercial revêt alors plus d'importance, pour se retrouver, aujourd'hui, face à un dilemme entre des entreprises qui doivent faire du chiffre d'affaires et des agriculteurs invités à réduire leur usage d'intrants. Concilier économie et écologie devient alors le nouveau défi des équipes terrain qui voient leur métier se complexifier en termes de domaines d'intervention (lire p. 36 et 41) et d'adaptation à une typologie d'agriculteurs aux attentes multiples.

Des agriculteurs prêts à investir dans le conseil

Dans une période où les schémas d'hier sont remis en question, la présence du technico-commercial dans la cour de l'exploitation reste tout aussi vitale que du temps d'Edgard Pisani. Ce constat ressort nettement de la table ronde organisée par Agrodistribution, fin août, qui a réuni huit technico-commerciaux en agrofourniture et six agriculteurs de toutes les régions sur la perception que ces derniers ont de leur technicien.

" Je suis prêt à me passer du technicien sur le plan de la relation physique pour le commerce. Mais, pour la technique, je suis prêt à investir dans le conseil ", soulignait Julien Koegler, agriculteur alsacien. Le sacro-saint débat de la séparation du conseil et de la vente est alors revenu sur le devant de la scène. Quelle que soit l'évolution de sa mission, le TC verra sa fonction de conseiller encore plus affirmée. Après quel choix feront les agriculteurs ? Celui de Patrick Jicquel à la tête de 350 ha en Loire-Atlantique qui emploie les services d'un technicien indépendant et achète ses appros à un négociant via un groupement d'achats... ou celui de Sébastien Delaroche, agriculteur en polyculture-élevage dans les Côtes-d'Armor, qui a suivi son technicien dans Végam, née de l'absorption de son négoce par la coopérative Coralis.

Du technicien négociateur au paternaliste

Cependant, constat encourageant, le niveau de satisfaction des agriculteurs à l'égard de leur technico-commercial reste au niveau élevé de 93 %, malgré la perte de cinq points par rapport à 2006. Mesuré dans le cadre d'une enquête ADquation-Agrodistribution, ce taux reste bien au-dessus de ce qui peut être observé dans d'autres secteurs (lire le point de vue de Benoît Leygnier). Si, contre toute attente, les jeunes se déclarent " très satisfait " de leur technicien, il faut noter que les exploitants de formation supérieure (BTS et plus) sont plus exigeants avec une satisfaction globale qui tombe à 89 %. Toutefois, certains agriculteurs lui sont tellement attachés " qu'ils n'auront pas forcément les moyens de payer le service, comme le fait remarquer le formateur Alain Baraton qui a animé notre table ronde. Et les techniciens ne savent pas tous segmenter leur marché ". La rencontre organisée par Agrodistribution fut révélatrice de la diversité de typologie existante à ce jour. Pas seulement chez les agriculteurs, mais aussi chez les techniciens, entre ceux à l'esprit plus négociateur et ceux à l'esprit plus paternaliste, allant jusqu'à prendre certains agriculteurs par la main. Une dernière situation qui amène d'ailleurs à s'interroger sur son devenir. " Pas de souci pour nous tant qu'on est dans une situation où les agriculteurs doivent être réconfortés techniquement et économiquement. Mais s'ils s'en vont pour X raison, notre métier est mort ", estime Franck Michel du négoce Payre (Isère).

Et si le métier de TC disparaissait ?

Et si la profession de technico-commercial disparaissait, que feraient alors les agriculteurs ? " La nature a horreur du vide. Donc, le technicien serait remplacé par internet, le téléphone, le fax… ", commente Philippe Lafay agriculteur sur 500 ha, dans l'Allier. " Si le TC disparaît, des structures de conseil privé pourraient se développer ", estime Denis Muret de la coopérative Sevépi ajoutant, alors, que c'est à " nous d'adapter l'offre aux clients et de développer des services pour répondre, par exemple, à une baisse d'utilisation des produits phytosanitaires ".

L'adaptation est le mot d'ordre et l'ensemble des techniciens présents à cette table ronde se rassure en parlant de relation de confiance et de proximité. Pour les agriculteurs, la notion d'expertise devient indispensable. Ils ne cherchent pas spécialement une approche globale de leur exploitation, mais une bonne analyse de leurs productions. Et, surtout, la plupart tient à garder la main et rester responsable de ses choix. " A nous d'assumer nos décisions ", avance Sylvain Nique, exploitant 200 ha dans l'Ain.

Une relation qui doit gagner en maturité

Une meilleure connaissance des métiers des uns et des autres est alors une condition sine qua none. La table ronde y a participé en apportant sa pierre à l'édifice à travers une interactivité fortement appréciée par les participants. Dans une situation de marché où les prix font le Yo-Yo et où la confiance peut s'en trouver égratignée, il est essentiel que le métier de chacun soit mieux appréhendé. Ainsi, l'agriculteur peut prendre du recul et mieux faire la part des choses, entre ce qui est du ressort de son technicien et ce qui est du ressort du marché. Et la relation peut gagner en maturité.

Cependant, la vigilance est de mise quant à l'évolution de cette relation de part et d'autre. L'érosion de cinq points du taux de satisfaction des agriculteurs vis-à-vis de leur technico-commercial y incite. Tout comme la perte de confiance des techniciens dans l'avenir du métier d'agriculteur avec vingt points de moins (lire p. 34). Il ne faudrait pas que ce manque d'enthousiasme se retourne contre eux.

DOSSIER RÉALISÉ PAR HÉLÈNE LAURANDEL

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