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Maïs grain Les rendements résistent, les prix dévissent

En dépit d’une campagne marquée par les fortes chaleurs et la sécheresse, les rendements de maïs, bien que très hétérogènes, ressortent globalement corrects. Toutefois, l’effondrement des prix, au plus bas depuis quinze ans, met les maïsiculteurs dans le rouge.

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A la mi-octobre, plus de la moitié des maïs étaient récoltés selon Céré’Obs. Et si la moisson s’annonçait précoce, avec 40 % des semis réalisés mi-avril, elle se déroule finalement dans les standards. « Deux raisons à cela : la tendance des producteurs à laisser les maïs sur pied pour économiser des points de séchage et un mois de septembre moins favorable à la dessiccation qu’attendu dans une grande partie des régions de la zone septentrionale », explique Aude Carrera, animatrice filière maïs chez Arvalis.

Entre sécheresse et coups de chaud, les conditions estivales extrêmes ont mis les maïs a rude épreuve. Et si les rendements ont été affectés, ils restent toutefois honorables, bien que très hétérogènes. Arvalis estime la production française à 12,9 Mt, contre 13,5 Mt pour Agreste, qui table sur des surfaces plus élevées (1,55 Mha contre 1,45 Mha selon Arvalis). La production serait donc en baisse, mais se maintient proche de la moyenne quinquennale. Le rendement moyen national s’établit à 88,5 q/ha, soit un recul de 4 % par rapport à la moyenne 2020-2024.

En fonction des régions, les situations sont très contrastées. Les rendements chutent en Nouvelle-Aquitaine, dans les Pays de la Loire (jusqu’à -35 %), tandis que le Nord-Est tire son épingle du jeu avec une production proche de la normale. Les maïs irrigués s’en sortent mieux : 110 q/ha en moyenne, contre 77 q/ha pour les parcelles pluviales.

100 000 t de moins chez Maïsadour

Un constat partagé par les collecteurs. « Nous serons en dessous de la moyenne olympique, avec un rendement moyen de 80 à 85 q/ha contre 95 à 98 habituellement, estime Raphaël Comte, directeur métier du grain chez Oxyane. Si les maïs irrigués ont été affectés, les parcelles pluviales, elles, ont vraiment décroché avec des 40 q/ha. » Dans le Sud-Ouest, Maïsadour annonce une perte de plus de 100 000 t, tombant sous les 400 000 t de maïs collectés. « En non-irrigué, les rendements sont très mauvais sur les terres séchantes, avec au plus bas 40 q/ha. Sur les terres noires, nous avons pu monter à 85 q/ha. Cela fait une moyenne autour de 60-65 q/ha, contre 70-80 en temps normal. De plus, les maïs irrigués ont été décevants, avec une moyenne à 110 q/ha », détaille Frédéric Ducournau, animateur collecte. Dans le bassin alsacien, la récolte s’annonce plus favorable : « Il y a eu une bonne alternance chaleur-pluie sur le territoire, donc les rendements devraient être dans la moyenne, voire au-dessus », indique Nicolas Barjot, directeur du site InVivo d’Ottmarsheim (Haut-Rhin).

Côté qualité sanitaire, pas d’alerte majeure, le grain semble indemne de mycotoxines, même si la vigilance reste de mise sur les aflatoxines et les fumonisines, favorisées par les fortes chaleurs. En revanche, la gestion des adventices devient préoccupante depuis l’arrêt du S-métolachlore : « Les ray-grass résistants progressent et le datura gagne du terrain partout en France », prévient Aude Carrera. Une observation partagée par Nicolas Barjot, qui regrette l’absence de mesures locales pour contenir le datura.

Favoriser les récoltes précoces

Les premiers grains sont rentrés en moyenne à 20,5 % chez Oxyane, 26 % chez Maïsadour et 28 % en Alsace. Oxyane a d’ailleurs revu ses barèmes de séchage : « Nous les avons baissés de 20 % par rapport à 2024, soit une bonification de 5 € à la tonne jusqu’à fin octobre. Nous avons besoin de marchandises et donc d’accélérer la récolte pour exécuter les trains. Au 1er novembre, la baisse sera de 5 % par rapport à l’année dernière », précise Raphaël Comte.

Mais cette année, les producteurs tardent à récolter leur maïs dans l’espoir qu’il sèche sur pied et, ainsi, de limiter les coûts de séchage. « Au 20 octobre, nous n’avions encore aucun volume récolté en provenance de la plaine. Les producteurs attendent que l’humidité baisse, mais la météo devient automnale : le mauvais temps risque désormais de s’installer et de rendre les moissons vraiment difficiles sans bénéfice sur le taux d’humidité », prévient Nicolas Barjot. « Il y a un tel besoin de trésorerie que les agriculteurs se raccrochent à tous les euros qu’ils peuvent économiser », complète Frédéric Ducournau.

Prix : pas d’embellie

Et pour cause, les prix du maïs départ ferme se sont effondrés. « Ils tournent autour de 165 €/t, un niveau historiquement bas depuis quinze ans et sans perspective d’embellie à court terme », alerte Franck Laborde, président de l’AGPM. Une contraction portée par les récoltes records aux États-Unis et au Brésil et une parité euro-dollar, « qui coûte 20 à 25 €/t ».

Or les charges de production, elles, restent élevées ; supérieures à 200 €/t, malgré le recul de la facture énergétique. Le coût de la main-d’œuvre, du matériel et des engrais continue de peser lourd. Conséquence, selon Arvalis : le résultat courant avant impôt (RCAI) moyen des céréaliers tomberait à -14 000 €. « C’est la troisième année consécutive que le RCAI moyen est négatif. Nous faisons face à un triptyque mortifère : une production mondiale en hausse, des prix en dessous des coûts de production et des contraintes réglementaires qui deviennent intenables et favorisent la concurrence déloyale », déplore Franck Laborde.

Mathilde Soulé

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