Converti à la néochimie
Cédric Cabanes, 55 ans, a fait renaître de ses cendres l'entreprise Agronutrition, détruite par l'explosion d'AZF, et en a fait un modèle de développement durable.
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«Jusqu'en 1999, je n'avais jamais entendu parler de développement durable », avoue celui qui a effectué la première partie de sa carrière dans des groupes comme Shell, ICI ou la SCPA. En 1997, Cédric Cabanes entre à la Société commerciale des potasses d'Alsace pour diriger le département oligoéléments. Il doit préparer la filialisation de cette entité, qui perdait de l'argent, pour la vendre dans le cadre de la privatisation annoncée de la SCPA. Il est donc censé remettre à flot pour 2001, ce qu'on appelait alors l'« épicerie de Toulouse », avec huit collaborateurs et 3 M€ de CA. Il n'en aura pas le temps. Le 21 septembre de cette année-là, l'usine est soufflée par l'explosion d'AZF située à 250 m de là. Fort heureusement, ce jour-là, lui-même et dix-sept des vingt-sept salariés sont en séminaire de lancement de campagne dans les Pyrénées-Orientales. Les dix autres sont blessés, plus ou moins grièvement. « C'était Beyrouth », se souvient-il, lorsqu'il revient précipitamment à Toulouse, l'image incrustée à jamais dans sa mémoire.
Un Grenelle bienvenu
« Le président du conseil d'administration m'a alors fait savoir que l'activité serait arrêtée. A l'unanimité, les salariés me demandent pourtant de continuer. Grâce à leur détermination, l'aide de l'Etat, de la région et de Total, j'obtiens les conditions financières nécessaires à la renaissance de l'entreprise en décembre 2001. » L'environnement socio-économique toulousain, traumatisé, se révèle alors hostile aux entreprises exerçant dans la chimie, qui plus est, dans les engrais. « J'ai dû inscrire le plan de développement de l'entreprise dans les trois piliers du développement durable et supprimer du catalogue 30 % des produits. » Une implantation en 2003 est trouvée à Carbonne, au sud de Toulouse. Cependant, le projet de revente échouant, le personnel décide de reprendre l'entreprise qui n'a alors de cesse de proposer des références durables. Un effort concrétisé en 2008 lorsque, confortée par le Grenelle de l'environnement, Agronutrition dépose un projet de recherche baptisé Néofertil , labellisé par le pôle Agrimip innovation, qui vise à développer une gamme innovante de biofertilisants et de servi ces associés. La PME toulousaine rejoint d'ailleurs le club très fermé des entreprises (moins de 5 dans le monde) qui savent produire in vitro les endomychorizes.
Entrepreneur responsable
« Au final, le positionnement qui a été pris au printemps 2002 s'avère ultra payant », se félicite celui qui est depuis 2011 président de l'Union des industries chimiques de Midi-Pyrénées , avec un projet : proposer une nouvelle chimie pour la région. Depuis dix ans, l'effectif de la PME n'a cessé de croître, formé en bonne partie de matière grise toulousaine. Cédric Cabanes a d'ailleurs été président des anciens élèves de l'Ecole d'agronomie de Toulouse, pendant sept ans. Il est aussi membre fondateur de « Sol, les entrepreneurs de la planète », association née en 2010 qui regroupe des patrons s'engageant à employer des ressources locales et à laisser de la valeur sur le territoire. Aujourd'hui, filiale de De Sangosse, Agronutrition emploie soixante-douze salariés, actionnaires du groupe, et devrait réaliser un CA 2011-2012 voisin de 25 M€, dont un tiers à l'export. Elle entend bien devenir la référence en France dans l'utilisation des micro-organismes pour la fertilisation. Avec son récent service, Solactiv, ce sont cinquante nouveaux collaborateurs qui pourraient être recrutés d'ici à 2016.
Renaud Fourreaux
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