Pourquoi les cours du blé ont peu de chances de rebondir d’ici la fin de campagne
Depuis l’automne 2022, les cours du blé n’ont cessé de refluer jusqu’à tutoyer les 200 €/t ces dernières semaines. Saufs aléas climatiques et géopolitiques, l’offre conséquente en mer Noire et la lourdeur des stocks mondiaux en maïs ne devraient pas permettre un raffermissement des prix avant l’été.
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1 Une offre abondante en mer Noire
À l’issue de la première partie de campagne 2023-2024, la Russie détenait encore environ 22 Mt de blé (contre 14 Mt l’an dernier à cette période). Elle se retrouve alors dans l’obligation d’accélérer ses exportations d’ici fin juin. Parallèlement, l’Ukraine a elle aussi des quantités de blé tendre importantes à écouler. Depuis la réouverture des ports profonds, elle a pu approvisionner en quantité le marché mondial. « Au mois de décembre, l’Ukraine a été capable d’écouler 4,8 Mt de blé depuis Odessa, ainsi que 1,4 Mt via le Danube, 0,8 Mt par le transport ferroviaire et 0,1 Mt par les camions », illustrait Arthur Portier, consultant senior chez Agritel, lors de la Paris Grain Conference fin janvier. Kiev est donc redevenu un acteur clé sur le commerce international du marché des grains.
2 Des stocks de maïs pléthoriques
Par ailleurs, les stocks mondiaux de maïs ont considérablement augmenté, passant de 38 Mt en 2020 à 60 Mt actuellement, et exerçant une pression à la baisse sur les prix du blé. « Ces derniers ne peuvent pas s’envoler, étant donné le caractère substituable du maïs, notamment pour l’alimentation animale », confirme Arthur Portier. Au regard de cette situation en maïs et de l’abondance de blé en mer Noire, « le marché du blé tendre devrait donc être stable à baissier jusqu’à la fin de la campagne 2023-2024 », envisage Arthur Portier. Depuis janvier, les cours n’ont d’ailleurs cessé de continuer à baisser, passant même sous les 200 €/t mi-février sur l’échéance mai 2024 d’Euronext, et retrouvant ainsi leur niveau de l’été 2021.
3 Un phénomène de rétention
Face aux faibles prix du blé et aux conditions de semis difficiles à l’automne, certains agriculteurs européens ont fait de la rétention pendant le premier semestre de la campagne 2023-2024. C’est le cas en France, où seulement 52 % des stocks de blé ont été écoulés sur cette période. D’après FranceAgriMer, cette situation était due, dans un premier temps, à l’espoir d’une remontée des prix. Désormais, elle est liée à un phénomène de report sur la prochaine campagne 2024-2025, les agriculteurs souhaitant compenser la petite production à venir, qui pourrait ne pas dépasser les 30 Mt selon Argus Media France.
4 Des incertitudes majeures
Le cabinet d’analyse s’attend à ce que les stocks de blé des principaux pays exportateurs restent élevés à l’issue de la récolte 2024. En effet, l’offre russe pourrait atteindre 90 Mt, et la moisson ukrainienne 22 Mt. Mais la situation est ouverte. Des facteurs majeurs d’incertitude subsistent, tels que les élections présidentielles dans de nombreux pays, le contexte géopolitique tendu ainsi que les aléas climatiques. En Europe, les conditions de semis difficiles en France, en Allemagne et au Royaume-Uni sont de nature à générer une faible récolte. Du côté de la demande, celle-ci pourrait baisser en Chine en raison de l’augmentation du nombre de variétés OGM autorisées. Tandis qu’elle pourrait croître en Inde afin de palier la mauvaise récolte de l’an dernier.
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