Les semenciers veulent mieux structurer la filière protéagineux
Semenciers, organismes stockeurs et producteurs ont évoqué, jeudi 6 février, lors de la rencontre « Filière semences » organisée par Semae et l’AGPB, le besoin de concertation et d’efforts de recherche sur les cultures de protéagineux confrontées à de nombreuses difficultés.
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Lors d’une table ronde organisée jeudi 6 février à Paris par Semae et l’AGPB, dans le cadre de la rencontre « Filière semences », les professionnels ont fait le point sur la situation « sinistrée » des protéagineux. « J’ai connu, au tout début des années 1990, des surfaces de pois protéagineux supérieures à 800 000 ha, mais je ne suis pas certain qu’il y en aura beaucoup plus que 100 000 ha cette année », a introduit Thierry Momont.
Le président de la section céréales à paille et protéagineux de Semae s’inquiète de cet « effondrement » des surfaces qui « compromet le financement de la recherche pour des espèces dont le taux d’utilisation de semences certifiées est particulièrement faible ».
« Spirale négative »
François Cuvelier, directeur commercial chez Agri Obtentions, est revenu sur la « spirale négative » que connaît aujourd’hui la filière du pois. La culture est en effet confrontée au changement climatique depuis plusieurs années avec une succession d’années sèches et humides, et au développement du champignon Aphanomyces.
« La moyenne nationale de rendement du pois recule, car les bassins de production se sont décalés vers les zones intermédiaires moins productives et il n’est pas toujours mis dans les meilleures parcelles de l’exploitation, pointe-t-il également. Le pois a aussi été introduit trop souvent dans la rotation, alors qu’il doit revenir au maximum tous les six ans. »
« Nous avons besoin des protéagineux pour structurer les sols »
Céline Gillet, directrice générale de la coopérative auboise Scara, a confirmé de son côté, le constat de Thierry Momont : « Il y a vingt-cinq ans, les pois représentaient 15 % de notre assolement ; actuellement, nous avons une filière de niche pour l’oisellerie avec des pois marbrés sur 500 ha. » La coopérative compte 60 000 ha cultivés sur son périmètre.
Pour autant, « aujourd’hui, il y a une démarche probante de conservation des sols et les oléoprotéagineux, dont le pois, nous y aident, notamment en améliorant la structure, considère-t-elle. Par ailleurs, nos clients historiques, malteurs et brasseurs, ont annoncé leur stratégie “zéro carbone net” en 2035 et, pour mener ces démarches, nous avons besoin du retour des protéagineux afin d’allonger les rotations. »
Améliorer le rendement
« Ce qui grève la rentabilité du pois aujourd’hui, c’est le rendement, a lancé Adrien Dupuy, agriculteur dans l’Oise et administrateur à la Fop (Fédération des producteurs d’oléoprotéagineux). En 2024, avec de très faibles rendements et un prix spot vers 300 €/t, le producteur n’arrive pas à couvrir ses charges de structure. Si l’agriculteur arrive à gagner de l’argent, il fera des pois et toute la chaîne suivra, des OS jusqu’aux consommateurs. Le pois a toute sa place dans les assolements, de par son intérêt agronomique, environnemental et sociétal en termes de souveraineté protéique. On ne peut pas imaginer que cette culture disparaisse. La Fop a ainsi pris les choses en main avec la profession. »
Il a été décidé de créer, avec trois sélectionneurs (RAGT semences, LG semences et Florimond Desprez), le GIE Peaboost dans le cadre du programme Pea4Ever. Objectif : la mise en commun de leur génétique pour aller plus vite dans la recherche de nouvelles variétés, et gagner 1 t/ha de rendement d’ici dix ans. En attendant ce renouveau génétique, pour combler une certaine méconnaissance technique sur ces cultures chez certains producteurs, la Fop souhaite créer des groupes pilotes d’agriculteurs encadrés par les services techniques des OS et de Terres Inovia.
Renouer le dialogue
« La génétique n’est pas une solution miracle, considère François Cuvelier. Pour réussir à créer de l’engouement sur cette filière, il faut que tout le monde y participe. Oui, la sélection doit amener des variétés avec plus de résilience face aux aléas climatiques et avec un meilleur rendement, mais il faut aussi que les débouchés existent. Qui achète et à quel prix ? »
« Nous sommes beaucoup d’acteurs sur cette filière, mais nous vivons les uns à côté des autres, a rebondi Adrien Dupuy, reconnaissant un manque de concertation. Il faut tous se mettre autour de la table, du producteur au metteur en marché, pour s’accorder sur ce qu’il faut faire et ne pas faire. Nous avons tous à y gagner. »
Sur ce point, Thierry Moment a évoqué son souhait de développer entre l’UFS (Union française des semenciers) et Terres Inovia, le même type de relation que ce qui existe avec Arvalis. Objectif : que l’ensemble de la filière puisse se retrouver et échanger sur des thématiques pour lesquelles un éclairage commun est nécessaire afin d’apporter les meilleures solutions. « Aujourd’hui, nous avons un petit peu de mal à avoir des relations très structurées sur ces cultures et nous souhaiterons renouer le fil du dialogue avec l’institut », a-t-il insisté.
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