Les Ets Ledeinancrés dans l'exportation

Difficile d'être mieux placé que les Ets Ledein pour approvisionner le port de Dunkerque en céréales. Installée à Quaëdypre, près de Bergues, aux portes de Dunkerque, il était tout naturel que la société de négoce du Nord se tourne vers l'exportation. « Pratiquement la totalité de notre collecte de blé et d'orge, est commercialisée par le port de Dunkerque, explique Régis Ledein, cogérant de l'entreprise familiale, avec son frère. La Belgique située à seulement 15 km, constitue aussi un débouché privilégié pour nous. » Les Ets Ledein sont d'ailleurs actionnaires depuis sa création, de la Sica Nord céréales, implantée dans le port et spécialisée dans le stockage et l'expédition de céréales. L'entreprise familiale n'est pas une structure très importante. Son chiffre d'affaires oscille entre 6 et 8 M€ selon les années, et elle s'appuie sur une équipe de douze personnes. Elle est aussi de nature plutôt discrète. Cela ne l'empêche pas dans son secteur géographique, d'être un acteur majeur de la collecte de céréales et de la distribution de produits agricoles.

Des céréalesaux pommes de terre

Après leurs études d'ingénieur en agriculture, tous deux à l'Isa de Lille, Régis et Marc Ledein sont entrés tour à tour dans l'entreprise familiale, l'aîné, Régis en 1982, et son frère, en 1985. Cette année-là, ils ont succédé à leurs parents, Gérard et Claire, qui avaient créé le négoce en 1950. A l'époque, le jeune couple qui était installé sur une petite exploitation agricole, avait décidé de se lancer dans le commerce des céréales, des légumes secs, pois et haricots et de l'aliment du bétail, en parallèle à l'activité de la ferme.

Lorsqu'ils ont pris les rênes de l'entreprise, Régis et Marc Ledein se sont associés à 50-50 à la fois dans l'activité commerciale, la SARL Ets Ledein, et dans l'exploitation agricole.Régis qui avait une fibre plus commerciale, s'est davantage investi dans le négoce, et Marc, passionné par l'agriculture, a pris en charge l'exploitation agricole. « Nous avons profité de l'arrivée des fongicides en céréales pour étendre l'activité de l'entreprise aux phytos, souligne Régis Ledein. En parallèle, les deux jeunes entrepreneurs ont abandonné l'aliment du bétail et créé une activité pommes de terre. « Nous sommes dans une région de production de pommes de terre, indique-t-il. Il existait autour de nous plusieurs négociants spécialisés dans cette production, mais nous avons estimé que nous pouvions tenter notre chance sur ce créneau. » L'audace leur a donné raison, puisque l'activité s'est bien développée.

Compétence technique

Côté logistique, le négoce a trouvé judicieux de disposer de ses propres camions, pour assurer le transport des céréales. Il a investi successivement dans trois bennes céréalières de 30 t, qui lui permettent d'être très réactif en matière de chargement. « Pour optimiser la rentabilité de cet investissement, nous avons passé un accord avec un affréteur local, les camions et leurs chauffeurs, tournent ainsi toute l'année, et ne roulent jamais à vide », précisent-ils. Au fil des années, l'exploitation agricole s'est aussi agrandie, elle est passée de 17 ha en 1985, à 170 ha aujourd'hui. « C'est une ferme typique de grandes cultures de la région, nous y produisons les mêmes cultures que nos clients agriculteurs », explique Marc Ledein. En plus de son positionnement géographique, les points forts des Ets Ledein sont leur présence sur le terrain, leur disponibilité et la compétence de leur conseil technique. Le négociant compte aujourd'hui une centaine de clients agriculteurs actifs que chacun des membres de l'équipe connaît. « Chez nous, les agriculteurs ne sont pas des numéros, ils ont tous mon numéro de portable, mais aussi celui du patron », remarque Sébastien Bacquet, technico-commercial. « La disponibilité et le relationnel, c'est très important, mais il faut aussi que nous soyons compétents et en phase avec le marché, ajoute Régis Ledein, car notre environnement est très concurrentiel. Chacun de nos clients agriculteurs est démarché par au moins quatre interlocuteurs, en général deux négociants et deux coopératives. » Sur le plan technique, la compétence ne fait pas de doute.Sébastien Bacquet, entré dans le négoce, il y a près de vingt ans, est reconnu par la profession de l'ensemble des Hauts-de-France. Considéré par ses pairs comme une véritable encyclopédie des phytos, il connaît les matières actives et les conditions d'utilisation de chaque produit susceptible d'être utilisé sur les cultures de la région. Les évolutions de ZNT ou d'autorisation de mélanges d'une année sur l'autre n'ont aucun secret pour lui.

En matière de collecte, les Ets Ledein assurent le stockage de 95 % des récoltes de leurs clients. « Dans la région, les agriculteurs sont souvent producteurs de pommes de terre. Ils ont investi en priorité dans le stockage des pommes de terre et confient leurs céréales, à leurs organismes-stockeurs. » Le négoce dispose d'une capacité de stockage de 9 000 t pour une collecte de 15 000 t, mais il peut bénéficier des facilités de stockage de la Sica Nord céréales, et assurer des expéditions pendant la moisson. Si ce n'est pas suffisant, il fait appel à des prestataires extérieurs. Les Ets Ledein disposent d'un séchoir de 30 t/h pour les céréales à paille. Depuis quatre ou cinq ans, ils mettent le cap sur la qualité de la récolte pour le blé en orientant davantage le choix des variétés et les conseils de fertilisation. Ils ont aussi investi dans un Infratec. La collecte qui se situait plutôt aux alentours de 10 % de taux de protéines il y a quelques années, est passée en 2017, à 11 % en moyenne. Le négoce est d'ailleurs signataire de la démarche qualité lancée par Nord céréales en juillet 2017.

L'appui de la centralede référencement

En ce qui concerne l'approvisionnement, Régis Ledein a été l'un des acteurs majeurs de la construction de la centrale de référencement, Act-Appro, puisqu'il en a été son gérant de 2000 à 2017. « Jusqu'à la fusion avec Clef, précise-t-il. Sans ce groupement de négociants pour acheter en commun nos produits d'approvisionnement, les structures de la taille des nôtres auraient disparu. » En plus de l'achat groupé, nous pouvons nous appuyer sur le site de stockage de produits phytos Seveso de Ternas, ainsi que sur sa plateforme d'expérimentation. Outre des produits destinés aux céréales, oléoprotéagineux et pommes de terre, les Ets Ledein proposent aussi des semences, fertilisants et phytos pour les autres cultures de la région à savoir, les légumes de plein champ, les betteraves sucrières, le lin et les chicorées.A noter qu'ils ont depuis toujours fait le choix de ne proposer que des semences certifiées.

En pommes de terre, ils collectent 6 000 à 8 000 t par an, destinées pour 70 % au marché du frais et 30 %, à l'industrie. Sur le marché du frais, les pommes de terre sont triées et conditionnées sur le site de Quaëdypre et commercialisées en totalité à l'exportation, essentiellement vers l'Espagne et le Portugal, mais aussi la Belgique, l'Italie, la Grande-Bretagne et pour la première fois en 2017, la Roumanie. « Nous nous sommes équipés d'un robot, pour le conditionnement en sacs de 5, 10 et 20 kg qui nous a vraiment permis d'améliorer les conditions de travail du manutentionnaire », constatent les négociants. Pour les pommes de terre destinées à l'industrie, les Ets Ledein passent de plus en plus souvent des contrats en aval, avec Mc Cain en France et des industriels belges, et en amont, avec les agriculteurs. Mais ils approvisionnent aussi le marché libre.

Depuis qu'ils ont repris l'entreprise, Régis et Marc Ledein ont diversifié leurs activités. Ils sont passés pour les engrais, de l'ère du sac, à celle du vrac. Ils ont introduit les fongicides dans les exploitations, et testent aujourd'hui les produits de biocontrôle. Et ils ont vu les rendements en blé passer en l'espace de quelques années, de 40 à 80 q... puis, progressivement, à plus de 100 q/ha. Aujourd'hui, à quelques années de la retraite, ils ont chacun des enfants, mais peut-être pas forcément de successeurs. « Jusqu'à présent, nous n'y pensions pas vraiment, pris dans le feu de l'action, mais il faudra que l'on y réfléchisse », estiment les deux dirigeants.