Née l'été dernier de la fusion entre la société de collecte Thomas Sud-Ouest (TSO), filiale du groupe Agridis-Holdis, et la spécialiste en agrofournitures Semences et conseils, TS Agri connaît déjà une belle montée en puissance. « Semences et conseils était adhérente d'Agridis pour ses achats de produits phytos et de semences, explique Nicolas Molinero, le directeur de TS Agri. En 2010, son créateur partait à la retraite et n'avait pas de successeur. C'est donc tout naturellement qu'il a proposé à Agridis de reprendre son entreprise. De mon côté, j'avais créé Thomas Sud-Ouest en 2011 avec Agridis-Holdis. Les deux structures étaient complémentaires et voisines, et avaient une centaine de clients en commun. Il nous a semblé pertinent de les faire fusionner, en une seule entité bien identifiée, pour proposer une offre globale. »
Installée à l'entrée de Verfeil (Haute-Garonne), à l'Est de Toulouse, l'entreprise a collecté 50 000 t de céréales et d'oléagineux sur la campagne 2012, alors que Thomas Sud-Ouest ne représentait que 28 000 t l'année précédente. Elle a également vendu pour 4,2 M€ d'agrofournitures, tandis que Semences et conseils avait réalisé 3,4 M€ de chiffre d'affaires en 2011-2012.
Pas d'outil de stockage
« Dans notre secteur géographique, les coopératives agricoles sont en position de quasi-monopole, reprend Nicolas Molinero, qui a lui-même travaillé, pendant onze ans, dans une grande coopérative du Sud-Ouest. Or, un certain nombre de producteurs recherchent une autre relation avec leurs partenaires, en termes de conseils comme de produits ou de performance logistique. Il y a très clairement une opportunité à saisir, pour leur proposer une alternative. » TS Agri, qui regroupe déjà plus de quatre cents clients ne possède pas de silo, mais stocke les céréales collectées sur des sites appartenant à des partenaires, le plus souvent agriculteurs, avec lesquels elle signe des contrats de prestation. « Beaucoup possèdent des équipements qu'ils n'utilisent pas en totalité, précise le directeur. D'autres désirent investir dans des cellules de stockage et demandent à travailler avec nous. Nous sommes régulièrement sollicités. »
L'entreprise dispose d'une douzaine d'outils de stockage et ses activités couvrent un rayon allant du nord de la Haute-Garonne à la Méditerranée, en passant par le bord de l'Ariège et le sud du Tarn. Sur les 50 000 t collectées en 2012, la moitié a été stockée dans les silos d'agriculteurs prestataires. Certains céréaliers sont également équipés pour stocker leurs propres récoltes qu'ils gardent sur l'exploitation jusqu'à la vente.
Trois types de contrats
TS Agri propose aux agriculteurs trois types de contrats de vente, indexés sur le marché à terme. Dans la première formule, le producteur reçoit un acompte à la récolte, puis il est payé en fonction de l'indexation du prix du produit sur le marché à terme. « Il ne s'agit pas de spéculation, bien au contraire, cela permet de gérer le risque de l'agriculteur, sans avoir à stocker », précise Nicolas Molinero, qui s'occupe personnellement de la vente de la collecte et reste connecté en permanence aux fluctuations du marché. La deuxième formule repose sur le même principe, mais elle offre un prix minimum garanti. Dans ces deux contrats, c'est le producteur qui décide à quel moment il veut vendre sa récolte. La troisième formule propose toujours un acompte, puis un prix calculé en fonction de la moyenne des prix optimisée à la hausse, sur une période donnée.
L'entreprise a également mis en place une politique de valorisation des oléagineux, et notamment du colza, pour la fabrication d'huile. Elle accompagne les agriculteurs en les conseillant sur le choix de variétés riches en acides gras et sur une conduite des cultures favorable à cette production, et a versé en moyenne l'an dernier, 30 € de complément de prix à la tonne, lorsque le taux d'huile dépassait le seuil standard de 40 %. « Cela nous a permis de collecter 2 200 t de colza, ce qui est beaucoup en proportion de notre collecte, souligne le directeur. Nous nous y retrouvons, car nous valorisons bien les graines auprès des triturateurs, et nous reversons aux agriculteurs la plus-value gagnée. » Tous les oléagineux doivent, par ailleurs, être cultivés sous critère de durabilité, selon le schéma de certification 2BSvs. Pour vendre ses blés tendres et durs, TS Agri a établi des partenariats avec des meuniers et des semouliers français et espagnols. Ses cultures fourragères partent vers l'Espagne, tandis que les oléagineux, colza et tournesol sont vendus aux triturateurs implantés en France. « En septembre dernier, nous avons également affrété un bateau, sur le port de Sète, pour envoyer 3 300 t de blé dur à un semoulier italien, se félicite Nicolas Molinero. Et si l'occasion se présente à nouveau, nous recommencerons. »
« Du cousu main »
Côté appro, les produits phytos et les semences hybrides (tournesol, colza, maïs) sont fournis par la centrale d'achats Agridis, tandis que les engrais et les semences de céréales à pailles sont achetés localement. Tout est stocké à Verfeil, dans les locaux de l'entreprise, où se trouvent bureaux, magasin et entrepôt. « L'intérêt de la petite taille de TS Agri est de pouvoir être réactif et de beaucoup communiquer, explique Joël Voulcays, TC et référent phyto. En mars 2013, le climat très inhabituel pour le Sud-Ouest nous a obligés à changer de produits pour nous adapter aux maladies qui prévoyaient de se développer. En une semaine, nous avons réuni les agriculteurs pour leur transmettre l'information et leur faire modifier leur stratégie. Notre catalogue se compose de nombreuses matières actives très polyvalentes, qui nous permettent d'adapter les programmes de traitement en fonction des situations. »
TS Agri projette de développer les produits phytos destinés aux semences potagères, notamment en partenariat avec la société Astera Seed qui travaille avec une centaine de producteurs dans le Sud-Ouest. Afin de répondre à leur demande, la gamme « épisodique » proposée par TS Agri va s'étoffer pour s'adapter à la réalité de la demande. « Notre volonté est d'être dans une philosophie gagnant-gagnant avec nos clients, précise Joël Voulcays. Nous proposons du cousu main et nous avons notre place sur ce marché où notre différence constitue notre force, face aux grands groupes. »
Etre pointu en nutrition des plantes
« Les agriculteurs auxquels nous nous adressons réalisent un travail de plus en plus précis et cherchent à s'entourer d'un cercle d'experts pour les conseiller, ajoute Jérôme Caylet, TC et référent en nutrition des plantes. Ils sont également de plus en plus nombreux à s'intéresser à la nutrition des plantes. Pour tester de nouveaux biofertilisants et biostimulants, nous avons mis en place des essais sur blé dur, blé tendre, colza, tournesol et maïs, et notre gamme est en cours de développement. Nous sommes aussi reconnus pour le choix de nos engrais organiques. Nous en vendons 1 100 t par an pour les grandes cultures. »
Forte de ces atouts, TS Agri compte bien « densifier le nombre de ses clients sur sa zone d'appro et de collecte », à laquelle s'est ajoutée, ces deux dernières années, la région camarguaise où est collecté du blé dur. L'entreprise compte réaliser 5 M€ de chiffre d'affaires appro en 2013-2014 et espère collecter à nouveau 45 000 à 50 000 t. « Vu la baisse générale de la production de 15 à 20 % cette année, si nous maintenons notre tonnage, nous aurons augmenté notre part de marché », conclut Nicolas Molinero.
Florence Jacquemoud