Lesplene, l'allant de la jeunesse

Ce petit négoce landais a été créé il y a peu. Une démarche pas évidente, mais qui commence à porter ses fruits. Les résultats sont là.

Après avoir fini ses études, un BTS gestion comptabilité avec un volet agricole, Bertrand Charpentier qui a eu 28 ans en octobre, a voulu créer un négoce. Pourquoi un tel choix ? Ce fils d'agriculteurs est immergé dans le monde agricole depuis ses plus jeunes années, il a analysé le paysage agricole local et a voulu apporter sa pierre à l'édifice en passant de l'autre côté de la barrière. Son ambition, offrir une alternative aux solutions proposées par la coopération très présente sur le territoire, alors que le négoce " privé " a quasiment disparu.

C'est dans ces conditions qu'il a monté une EURL. Il s'est lancé seul dans le stockage de maïs en 2007 et le négoce a pris forme en septembre 2008. Il a choisi le nom du lieudit, c'est-à-dire Lesplene sur la commune de Sore où il s'est implanté, pour baptiser son entreprise. Démarrant avec beaucoup d'enthousiasme, il s'est heurté à un certain ostracisme. " Je ne pensais pas que ce monde pouvait être aussi cruel. Ça gênait beaucoup de monde qu'un fils d'agriculteurs se monte en négoce ", commente-t-il. Il a dû faire face aux réticences aussi bien des fournisseurs que des agriculteurs. " Je me suis battu et au bout de quatre ans, je commençais à rentrer dans les circuits. J'ai démarré avec beaucoup d'ambition, il aurait été dommage de baisser les bras " et, visiblement, le renoncement ne fait pas partie de ses habitudes.

Le stockage de maïs, à l'origine de la société

Il s'est attaqué aux Landes et aux territoires limitrophes qui présentent des caractéristiques assez similaires en matière de sol et de climat. Il part de la zone sable forestier des Landes jusqu'à la pointe du Médoc, entre la côte et l'estuaire de la Gironde et va jusqu'à Saint-Symphorien, Luxey et Captieux. " Je me limite pour bien faire les choses. Je ne veux pas de lacune sur mon territoire avant d'aller au-delà ", précise-t-il. Démarrant avec un silo de 4 300 T existant sur le site de Sore et loué à ses parents, il l'a rapidement complété avec un outil moderne et de plus grande capacité à Saugnacq-et-Muret. Il a investi 3 M€ dans un silo de 10 000 T avec un système de vidange par soufflerie couplé à un séchoir de 1 300 T par jour. Ce dernier a traité à 18 000 T en 2010. " Il y a beaucoup de dégagement en octobre. Je voulais offrir aux agriculteurs la possibilité de fractionner leurs ventes de maïs pour qu'ils puissent obtenir les meilleures conditions d'achats. Nous faisons du stockage à façon, les clients souhaitant stocker quand les cours sont bas ", précise Bertrand Charpentier. En fait, ces clients ont fini par lui vendre tout le maïs qu'ils avaient déposé chez lui, Bertrand Charpentier proposant des prix supérieurs à ceux des coopératives. La situation de ce silo est idéale, en bordure de l'autoroute qui relie Paris à l'Espagne et à une trentaine de kilomètres de Sore. Pour les expéditions vers l'Espagne qui représentent 20 % des volumes, Bertrand Charpentier traite avec des courtiers. Pour l'envoi des 80 % à destination du port de Bordeaux, il gère en direct avec une entreprise d'affrètement.

En ce qui concerne le négoce à proprement parler, il travaille avec Adour Appro. Lesplene ne stocke pas, son fournisseur livrant en 48 h. Les engrais sont amenés directement chez les clients. Les produits phytosanitaires et les semences sont déposés à SaugnacqetMuret et Lesplene loue un camion pour les distribuer en début de saison. Les petits volumes répondant à des demandes plus ponctuelles sont véhiculés en 4 x 4 avec plateau, mais aussi en voiture. Pour se démarquer, il a constitué avec le chef de réseau Adour Appro qui, dans son fonctionnement est quasiment intégré à l'équipe Lesplene, une gamme courte et spécifique de produits. En semences, il propose dix-huit variétés de maïs adaptées au sol des Landes.

Cette année, il s'est mis au blé et à l'orge, à petite échelle. Au niveau des produits phytosanitaires, il sélectionne quatre à cinq herbicides et deux insecticides. " Nous nous adaptons à la fore qui peut évoluer dans les champs de maïs. " Pour les engrais, il joue aussi sur trois à quatre formules. Et toujours, il privilégie la proximité. " Avec mon technico-commercial, nous tournons en culture et nous foulons le territoire, fait-il valoir. Nous faisons aussi, avec le sous-traitant Astria, des essais à quatre répétitions de semences de maïs, soit en bandes de 4 rangs sur 10 M de long répétées 4 fois, sur sable blanc. " Des essais seront effectués l'an prochain sur sable noir. Il met également à la disposition des agriculteurs des doses de semences qu'ils sèment et conduisent à leur façon. " Nous les aidons à faire des échantillons. Nous voyons avec eux s'ils peuvent faire des tests sur cinq variétés trois "classiques" et deux nouvelles qui arriveront sur le marché l'année suivante, à raison d'un hectare par variété. "

Développer les services, un axe de travail

Parallèlement, Lesplene vend des citernes souples de 25 à 500 m3 qui servent principalement de contenant à des solutions azotées achetées en morte-saison à moindre coût. Bertrand Charpentier s'intéresse aux outils d'aide à la décision avec notamment des stations météo de plein champs. Deux sondes, à deux profondeurs différentes, enregistrent heure par heure l'humidité et la température du sol. Tous les matins un relevé est envoyé parcelle par parcelle pour que l'agriculteur connaisse l'état des cultures. Un dispositif complémentaire vient se greffer sur l'outil de mesures. Grâce à celui-ci, d'un simple clic depuis son ordinateur, l'agriculteur peut lancer le pivot d'irrigation. Le tout fonctionne avec n'importe quel type de pivot. Des tests ont été faits cet été, la commercialisation va commencer. Bien que l'investissement ne soit pas très important, Lesplene vendra le matériel ou le louera sur trois ans avec option d'achat en fin de contrat.

Toujours dans l'optique de se démarquer et d'apporter de la performance à ses clients, Bertrand Charpentier a organisé cet été un forum maïs. L'opération a suscité plus qu'un succès de curiosité avec 200 agriculteurs présents pour 350 invitations envoyées. Très concret, ce colloque portait sur la simplification des semis de maïs et traitait de l'exploitation des ressources génétiques avec Caussade Semences, Monsanto, Pioneer et Syngenta et sur les techniques innovantes de l'irrigation au semis. Bertrand Charpentier tenait à mettre en avant la technique du semis direct sur mulching peu connue dans les Landes. Une approche très adaptée aux nouvelles conditions de cultures de la zone. Après deux tempêtes lourdes, les forêts ont été massacrées et les pins n'arrêtent plus les vents. De ce fait, les vents de printemps font voler le sable quand le maïs commence à avoir deux à trois feuilles. Les effets sont dévastateurs et il faut replanter le maïs. Si les semis se font sur débris végétaux, ce problème est résolu. Les quatre semenciers ont présenté chacun huit variétés en semis direct et simplifié. Chacun disposait d'un hectare et devait planter huit rangs par variété. Les parcelles étant éclatées, les participants étaient transportés en bus de l'une à l'autre. Le budget de cette opération s'est monté à 25 000 €. Elle devrait être reconduite tous les deux ou trois ans.

Une montée en capacité programmée

Lesplene montant en puissance, Bertrand Charpentier a procédé à des recrutements. Il a commencé en faisant appel à des proches, son frère Charles-Henri a la responsabilité du silo, mais aussi de l'offre de services pilotage de l'irrigation, son épouse et sa belle-soeur clémence sont en charge de l'administratif. Le premier recrutement hors du cercle familial a été celui de Florian Poudens, technico-commercial embauché en décembre 2010. Ce dernier sera épaulé par un autre technico-commercial d'ici à la fin de l'année. L'ensemble du territoire à couvrir tel que l'a défini Bertrand Charpentier sera ainsi partagé entre eux deux. Les effectifs de l'entreprise se monteront alors à six salariés. Parallèlement, un nouveau silo de 12 000 T sera installé en 2012, toujours à Saugnacq-et-Muret, suivi par un autre de même capacité en 2013.

Claude Mandraut

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