"Le petit parmi les grands et le grand parmi les petits. " Les Etablissements Lucien Walch SAS, à Burnhaupt-le-Bas dans le sud-ouest du Haut-Rhin, auraient-ils une cote un peu mal taillée ? Ce n'est pas l'avis de Jean-Luc Walch, PDG depuis 2000 de ce négoce familial. " Nous représentons 7 % de part de marché dans le département. Nous avons toujours su trouver, seuls, des pistes pour nous affirmer ", lance-t-il. La structure actuelle est le résultat d'une histoire qui commence avec Jean-Baptiste Walch, grand-père de Jean-Luc, qui décide du regroupement des premiers sacs de blé pour fournir des meuniers faisant partie de la famille. L'activité de négoce débute au début des années 1960 sur une ferme au coeur de la commune qui ne conserve plus aujourd'hui que les bureaux, un stockage appro, mais aussi quelques lots de blés de qualité et de céréales secondaires. L'augmentation des rendements et de la collecte conduit à la construction successive en 1980 et 1981 d'un dépôt d'engrais vrac et d'un nouveau site de stockage en périphérie du village. Ce dernier prend de l'ampleur avec l'ajout au fil des ans de trois séchoirs capables de traiter 1 200 t de maïs humide par jour, de 12 000 t de silos, dont un ventilé à plat de 5 500 t, d'une possibilité de mélanger les engrais ou de les conditionner en big bags.
Un palier de 50 000 t de maïs grain
L'activité des Ets Walch se concentre sur deux zones : l'une franchement spécialisée dans le maïs grain au nord, l'autre à dominante élevage au sud-ouest de Burnhaupt. Elles sont quadrillées par une équipe de six techniciens réunie une fois par semaine. Jean-Luc Walch leur fixe des objectifs en terme de chiffre d'affaires et de volume par produits. La partie variable de leur rémunération dépend de leur performance. Cinq TC travaillent en grandes cultures et un en élevage. Ce dernier poste a été créé en 2006. " Jusque-là le conseil était assuré par le fournisseur d'aliment. Avec notre propre TC, nous sommes devenus plus pointu. L'éleveur préfère discuter avec un technicien spécialisé ", analyse Jean-Luc Walch. L'équipe commerciale s'est renforcée à partir de 1986 et le retour de Jean-Luc Walch dans l'entreprise. Il a développé le portefeuille clients en embauchant deux nouveaux TC venus de la concurrence. Il a répondu à une demande en installant un point de collecte en Haute-Saône, un autre dans le Doubs. Le premier réceptionne surtout des céréales à paille et du colza, le second du maïs directement acheminé sur le Rhin. " Nous travaillons avec deux entrepreneurs de travaux agricoles. Nous assurons une prestation sans avoir eu beaucoup à investir ", se félicite Jean-Luc Walch.
La décennie 1990-2000 correspond à celle du décollage de la collecte de maïs. Elle passe de 20 000 t en 1990, à 50 000 t en 2000. " C'est un palier sur le site actuel. Nous manquons de capacité. Un peu plus de la moitié doit être vendue à la récolte. Et si elle est rapide, nous risquons très vite l'engorgement ", reconnaît Jean-Luc Walch. Une demande d'agrandissement a été refusée en 2000 à Burnhaupt car, en vingt ans, les habitations sont arrivées jusqu'aux abords immédiats du site. " Il faudrait construire ailleurs, éventuellement avec un partenaire, mais cela fait au moins 5 à 6 M€ à trouver ", calcule Jean-Luc Walch. Faute de mieux, le négociant se débrouille avec 12 000 t de stockage situées à Burnhaupt et 8 500 t louées sur trois silos portuaires à Ottmarsheim (5 000 t), Huningue (3 000 t) et Neuf-Brisach (500 t). Le débouché fluvial est une condition sine qua non pour voir partir le maïs chez les amidonniers et les fabricants d'aliment implantés le long du Rhin. Une certification GTP/CSA donne notamment la clé d'accès au marché néerlandais.
Une palette de services
Pour soutenir la comparaison avec leurs concurrents directs, une coopérative et quatre autres négoces, les Ets Walch se doivent de proposer une palette complète de services. Ils s'appuient tout d'abord sur des partenaires comme Agridis pour l'accompagnement réglementaire, l'accès à de meilleures conditions commerciales et l'approvisionnement en phytos depuis Blois, ou Isagri pour proposer la gestion parcellaire. Jean-Luc Walch sent le besoin d'approfondir cette vision avec le logiciel Olympe. " Pour cela, il nous faudrait un spécialiste. J'y réfléchis ", assure le PDG.
En alimentation animale, les Ets Walch travaillent avec deux fabricants. L'Allemand Muskator que les Ets Walch livrent en orge, triticale et maïs, fournit en retour de l'aliment vaches laitières. Les camions qui effectuent l'aller-retour sur Mannheim à 250 km ne font pas de rotation à vide. Le même fonctionnement a été adopté avec le régional Costal qui couvre les besoins en laitières, jeunes bovins et ovins. Le négoce entend ensuite coller à la demande. L'offre classique s'articule autour des analyses de sol et de fourrages, des formules d'engrais à la carte, de livraisons en vrac dans la benne de l'agriculteur au champ, de plans de fertilisation et du pilotage de l'azote sur blé, d'essais variétaux par zones, de calcul de ration, de participation aux opérations de recyclage de bidons vides et de produits périmés. Mais il y a plus rare. Les Ets Walch proposent du triage à façon d'orge, de blé et de triticale. De juillet à octobre, une machine itinérante traite chaque année dans les 350 t en prestation de service. En 2005, l'entreprise s'est diversifiée. Détectant un " vide ", elle a lancé sa jardinerie Tournesol, agrandie à 600 m2 couverts en 2010. Elle emploie deux personnes pour 700 000 € de chiffre d'affaires.
Un deuxième camion de livraison de granulés en 2010
Le négoce a surtout investi le créneau du granulé bois. " L'idée nous est venue d'Allemagne où des confrères utilisent leurs camions qui livrent de l'aliment du bétail pour approvisionner des chaudières des particuliers et de collectivités. Le granulé revient 30 % moins cher que le fioul et son prix fluctue moins ", indique Jean-Luc Walch. Ce choix a été le bon. Partie de rien, cette activité génère aujourd'hui un chiffre d'affaires de 1 M€. Mais " d'autres fournisseurs se lancent. Nous voulons garder notre avance ". L'entreprise s'approvisionne en Allemagne ou dans le Doubs. Un stock tampon de 500 t est localisé à Burnhaupt. Un deuxième camion de livraison dédié de 16 t tourne depuis 2010 en Alsace et sur le Territoire de Belfort. L'ambition est d'augmenter la part de marché dans le Bas-Rhin en participant à des salons spécialisés et en faisant de la publicité dans des revues spécialisées.
Répondre à la demande de contractualisation
Tout cela ne fait pas oublier à Jean-Luc Walch que la céréale reste son coeur de métier. Le négoce ne s'attend pas à être trop affecté par la stratégie de confinement de la chrysomèle du maïs qui impose aux agriculteurs alsaciens une rotation de 17 % de leur sole maïs 2010. Il perdra certes quelques tonnes mais pourrait également profiter d'un rééquilibrage de son activité de collecte entre juillet et octobre. Il propose des contrats en maïs cornés et en blés spécifiques (Aubusson, Camp Rémy, Soissons) et de force (Achat, Runal, Monopol). " Notre outil se prête bien à cette collecte. Chaque benne est analysée avant déchargement dans quatre fosses de réception qui peuvent être dédiées. L'allotement est possible en cellules de 100, 200 ou 500 t. Une cinquantaine d'exploitations ont signé des contrats. Elles bénéficient de primes de 3 à 45 €/t. Cela nous assure une collecte et rassure nos clients. Confrontés à des marchés volatils, ils veulent de plus en plus figer les choses. C'est le message qu'ils nous transmettent et auquel nous essayons de répondre. "
Christophe Reibel


