Ets Lamy : encore de beaux projets

Bien qu'il soit dans un environnement très concurrentiel, Jean-Claude Lamy a réussi à tripler la collecte en trente ans. Et il ne compte pas s'arrêter là.Jean-Michel Nossant
Bien qu'il soit dans un environnement très concurrentiel, Jean-Claude Lamy a réussi à tripler la collecte en trente ans. Et il ne compte pas s'arrêter là.Jean-Michel Nossant

Jean-Claude Lamy a su développer son entreprise dans les Deux-Sèvres, en se fondant sur un triptyque d'activités. Dans quelques années, il tournera la page. En attendant, il a encore de beaux projets dans les cartons.

Entrepreneur et consensuel, Jean-Claude Lamy est à la tête de l'entreprise depuis 2001. Collecte de céréales, approvisionnement et alimentation animale sont les principales activités du négoce familial, créé en 1926 par le grand-père de Jean-Claude. Avec son équipe de dix-huit personnes, il mise sur la mutualisation des structures et sur le service aux agriculteurs pour développer des parts de marché. Et il avance, tranquillement, mais sûrement. En 1981, lorsqu'il entre dans l'entreprise comme technico-commercial, la SARL Lamy collecte 25 000 t de céréales. Trente-cinq ans plus tard, ce chiffre a triplé, atteignant 77 000 t en 2015. Pour assurer la croissance de la collecte, des investissements dans quatre sites ont été réalisés progressivement. Le site historique de Luché-sur-Brioux possède une capacité de 11 000 t. Juste en face, de l'autre côté de la route, celui de Lusseray, construit en 1999, comptabilise 9 000 t de stockage à plat. Le silo de Saint-Médard, mis en service en 1994, a été conçu pour collecter 3 000 t de grains. Mais six ans plus tard, il est agrandi pour réceptionner jusqu'à 9 000 t. Enfin, à Loubillé, le dernier site créé en 2007, peut collecter jusqu'à 5 000 t. Il devrait être agrandi en 2017. Jean-Claude Lamy va investir 400 000 € pour développer une nouvelle cellule de 3 000 t. Et ce n'est pas fini. La capacité de stockage à plat du site de Lusseray devrait doubler d'ici à deux ans.

Des céréales pour l'export

En cette fin de campagne de commercialisation, le chef d'entreprise est plutôt satisfait. Les stocks sont bas. Le blé, première céréale collectée, s'est vendu au prix de marché. Le maïs est certifié classe A « Maïs qualité Sud-Ouest » pour pouvoir être transporté au port. « Nous prenons toutes les qualités, nous n'avons pas de marché de niche. « Le tout-venant » nous convient bien par rapport à nos équipements de stockage. C'est une stratégie qui fonctionne », ajoute Jean-Claude Lamy.

Les Ets Lamy collectent 65 000 t de céréales (blé, maïs, orge) auprès de 350 clients. 80 % de la production part sur le port de La Pallice, à La Rochelle, auprès d'exportateurs comme Soufflet, Lecureur, Eurafrique qui expédient vers le Maghreb, et de groupes internationaux comme Glencore et Nidera. Les 20 % restants sont destinés à la transformation animale. Le négoce des Deux-Sèvres commercialise également 12 000 t de colza et de tournesol, en grande majorité auprès de Cargill, à Saint-Nazaire, et dans une moindre mesure auprès de Centre Ouest céréales, une coopérative voisine qui possède une usine de trituration à Chalandray (Vienne).

Pour la commercialisation, Jean-Claude Lamy, qui pilote lui-même cette activité, s'est rapproché de la SAS Atlantique céréales, une structure qui regroupe une quarantaine de négoces et assure la mise en marché d'environ 1 Mt de grains par an. « Au départ, nous étions six négoces de la région à mutualiser notre commercialisation. Puis d'autres négoces de la Bretagne, du Centre Val de Loire, de l'Aquitaine, nous ont rejoints. Aujourd'hui, nous avons embauché trois commerciaux. Cette mutualisation nous permet d'obtenir des bulletins quotidiens sur les analyses du marché, un service sur la météo, et des opportunités de marché. Tout seul, nous n'aurions jamais pu bénéficier de ces services », indique Jean-Claude Lamy.

Une mutualisation des sites et des activités

Dans cet esprit de mutualisation, le négoce Lamy participe au GIE Océrail, créé il y a une trentaine d'années. Ce silo, embranché fer, commun à trois coops et quatre négoces (Sèvre et Belle, Coréa, VSN, Ferru, etc.), stocke 100 000 t. Quatre personnes s'occupent de toute la logistique et de l'entretien du silo. Les Ets Lamy, qui sont propriétaires de 5 000 t et locataire de 3 000 t de capacité de stockage, y envoient tous les oléagineux qui partent en train pour Saint-Nazaire. Avec l'augmentation de la collecte, le GIE Océrail souhaite se développer, mais le site, basé à La Crèche, est complet. Un autre silo en commun pourrait voir le jour prochainement. Du côté de l'appro, Jean-Claude Lamy joue également la mutualisation. Les produits phytosanitaires et les semences sont achetés au groupement Actura, fusion d'Agridis et de D'Clic en juillet 2015. Avec ses cent trente-trois adhérents, pour un total de cent cinquante-quatre entreprises, Actura représente un potentiel d'achat de 410 M€, dont 315 M€ en phytos et 800 000 doses de semences. Les prix sont-ils réellement plus intéressants, grâce à l'effet de groupe ? Sans hésitation, Denis Maufras, responsable approvisionnement (phytos, semences), répond positivement. « Les trésoreries des céréaliers sont touchées par les cours des céréales. Les agriculteurs achètent moins de produits phytos. Néanmoins, sur le terrain, on ne perd pas de part de marché. C'est que les prix doivent être intéressants ! »

C'est la présence sur le terrain qui compte

Pour les engrais, Lamy est un des vingt-sept actionnaires de l'entreprise Aubrun-Tartarin, achetée en 2008. Deux usines fabriquent et conditionnent de l'engrais, une à Parthenay, l'autre sur le port de La Rochelle. En huit ans, les quantités vendues ont plus que doublé, passant de 60 000 à 170 000 t, pour un chiffre d'affaires de 50 M€ en 2015. Aujourd'hui, la société évolue et change de nom. Il a été divulgué fin mai, lors du congrès du groupement Négoce agricole Centre-Atlantique. L'entreprise s'appellera désormais Amaltis. 60 % des engrais sont achetés à cette entreprise et le reste principalement au fournisseur Yara. Autre activité, la distribution d'alimentation animale. Dans les années quatre-vingt-dix, à peine 3 000 t d'aliments étaient vendues. « Il fallait faire un choix : soit nous arrêtions, soit nous embauchions pour développer cette activité. J'ai misé sur la deuxième solution et je ne le regrette pas », explique Jean-Claude Lamy. Mickaël Babin, qui a été embauché pour cela, raconte. « Je suis entré comme apprenti pour développer l'alimentation animale sur deux cantons. Dix-huit ans après, nous rayonnons sur plusieurs départements. Nous allons continuer de nous développer notamment dans le nord des Deux-Sèvres. » A l'heure actuelle, Lamy distribue 15 000 t d'aliments, fournis par Sanders, pour plus de la moitié à des élevages caprins. Le négociant développe aussi une gamme de mash (mélange de matières premières non transformées) pour les vaches laitières. Son objectif est d'arriver à 20 000 t dans trois ans.

Comment expliquer ce développement ? « Tout simplement en faisant du commerce ! sourit Jean-Claude. Il n'y a pas de guerre des prix, c'est la présence sur le terrain qui compte. » Pourtant, la concurrence est forte dans les Deux-Sèvres, avec deux coopératives et au moins quatre négoces, sans compter les organismes stockeurs des départements limitrophes. « La concurrence a toujours existé. C'est la faculté du négoce privé de s'adapter. Ce qui nous pèse, c'est la réglementation. Que ce soit pour l'environnement, la traçabilité, le social, nous devons en permanence montrer patte blanche. Nous faisons tout pour bien faire, mais c'est usant », lance Jean-Claude Lamy.

Pour se faire une place dans le paysage des Deux-Sèvres, Jean-Claude a également misé sur une ambiance d'équipe familiale. Les bureaux sont ouverts et tout le monde discute. Lors des moissons, il fait appel à un traiteur pour que tout le personnel mange ensemble. Il y a quelques jours, technicos, secrétaires et agents de silo se sont retrouvés au bowling ! Sûrement une des recettes qui expliquent que l'entreprise connaît très peu de turnover. Mais dans quelques années, les Etablissements Lamy connaîtront un tournant. Jean-Claude, âgé de 56 ans, va prendre sa retraite. La quatrième génération n'est pas intéressée pour reprendre l'entreprise. Alors que faire ? « Je suis convaincu qu'il faut se rapprocher les uns des autres. Je me vois bien fusionner avec un autre négociant. Certes, ce serait peut-être plus intéressant de vendre à une coopérative, mais je le vivrai mal de vendre à une coopérative concurrente. Le bien-être et l'esprit d'équipe passent avant l'aspect financier », conclut Jean-Claude.

Aude Richard

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