Chez Phyto Service, comme dans toute famille, on n'en finit plus de fêter les anniversaires : les trente ans en avril 2009 avec tous les collaborateurs et encore les trente ans en avril dernier, avec en prime les vingt ans de l'activité pièces détachées agricoles. Pas moins de 320 invités dans le cadre de Terra Botanica en Anjou. De belles occasions pour ce négociant privé de rassembler ses équipes éclatées dans onze départements et de renouer les liens de la première heure qui prévalaient lors de sa création en mai 1979. Dix-huit personnes travaillaient alors chez Phyto Service, contre soixante-dix aujourd'hui. Le livre d'or ouvert pour ces occasions festives le confirme : « L'esprit de famille d'il y a trente ans est toujours là. » « Comme d'habitude, rien n'a été laissé au hasard », témoignent ainsi plusieurs collaborateurs.
« Rien n'a été simple, mais tout est possible et ensemble on est plus fort », aime également à répéter Laurence Gosseaume, directeur général de Phyto Service. Dans la société depuis 1992, l'aînée de la fratrie Gosseaume a pris les rênes de l'entreprise en mars 2004, pour en assurer la pérennité et le développement : « Trente années, c'est une étape, mais aussi un nouvel horizon qui s'appuie sur les mêmes valeurs : le service et le conseil à la clientèle. »
Management participatif avant tout
« Directeur général est mon mandat social, ma mission opérationnelle et salariée, ce sont les ressources humaines et je ne conçois le management que s'il est participatif, le capital humain est ma priorité », explique Laurence Gosseaume. Qu'on se le dise, celle-ci n'aime pas se mettre en avant et même pour la photo de cet article, Phyto Service a fait le choix de l'équipe. Dans une de ces rares entreprises à direction féminine du milieu agricole, la parité n'est pas totale mais les femmes sont très présentes à la gestion. Chaque site est par ailleurs géré comme un centre de profit individuel et tous les collaborateurs sont très impliqués dans leur propre bilan d'activité.
Et si ce négoce cultive autant cet esprit d'équipe soudée, c'est aussi parce que cette entreprise souhaite continuer à avancer seule. A l'heure où la plupart des distributeurs agricoles unissent leurs moyens, travaillent en réseau ou créent des groupements, Phyto Service se replie sur sa tribu, son équipe, la fait grandir et essaime sa stratégie au-delà de ses frontières natales du Loir-et-Cher.
De la vente de phytos aux pièces détachées
Phyto Service a même pris un temps un air international lorsque la société américaine ConAgra Foods est entrée dans son capital en 1998, via sa filiale UAP (United Agri Products), distributeur agricole britannique. « Phyto Service devient anglophone, pas anglophobe », précise Laurence Gosseaume. L'Américain a toutefois revu ses désirs d'expansion en Europe à la baisse en recentrant Phyto Service en 2005 sur un holding financier créé pour l'occasion. Ce dernier est toujours présidé par Stephen Derbyshire, le dirigeant d'UAP.
Phyto Service, c'est ainsi aujourd'hui quinze magasins dans onze départements et soixante-dix collaborateurs. Mais attention, pas de traditionnels dépôts pour les agriculteurs adossés aux silos, ni de Lisa pour le grand public en périphérie des grandes villes. Non, des magasins pour pros, des vrais, sous le label « le magasin de l'agriculteur ». C'est-à-dire avec du libre-service, mais uniquement à destination de l'agriculteur professionnel qui y trouve tout ce dont il a besoin pour travailler : ses produits phytos bien sûr, le gros de l'activité (70 % du chiffre d'affaires), mais aussi ses semences, ses engrais et ses pièces détachées pour tout son matériel, quel qu'il soit et quelle que soit la marque.
C'est une des grandes spécificités de Phyto Service, lancée il y a vingt ans après le rachat d'un fonds de commerce de pièces agricoles dans le Calvados. Chaque magasin accueille aujourd'hui cette activité et parmi les deux commerciaux présents dans chaque point de vente, l'un est toujours spécialisé en pièces de rechange, l'autre en phytos et semences, chacun étant généraliste de la branche de l'autre. « Nous sommes les seuls au niveau mondial à vendre à la fois des phytos et des pièces détachées de matériel agricole », précise Laurence Gosseaume.
Les magasins Phyto Service sont aussi un moyen pour permettre aux agriculteurs d'acheter moins cher leurs appros, en venant les chercher eux-mêmes. C'est la base de la stratégie de ce négociant qui lui a valu à ses débuts une image de discounter pas toujours facile à porter. Le principe était pourtant bien de faire du discount, entendez un mode de commercialisation à l'américaine, type « cash and carry », c'est-à-dire de l'enlèvement sur place et du paiement comptant. « Ce que les fournisseurs n'ont pas toléré au départ, c'est la publicité dans les journaux avec l'affichage de nos prix », se rappelle Laurence Gosseaume.
Paiement comptant et enlèvement sur place
Mais ces temps sont bel et bien révolus, c'était une autre époque, la page est tournée et les relations de Phyto Service avec l'ensemble des fournisseurs sont aujourd'hui au beau fixe. Les règles de base des magasins de Phyto Service sont en revanche toujours là, notamment le paiement comptant et la remise à l'enlèvement.
De plus, ce négociant avance peut-être seul, mais il n'en pèse pas moins presque 2 % du marché national en phytos et près de 7 % du marché phytosanitaire dans ses zones d'activité. Dans notre dernier classement annuel (lire AD n° 201, janvier 2010), Phyto Service se place parmi les vingt-cinq premiers négociants agricoles français en terme de chiffre d'affaires et ambitionne de faire partie du top 5. Les ventes ne cessent d'ailleurs de croître, à périmètre pourtant constant depuis 2003, date de création du dernier point de vente dans la Nièvre.
Agriculteurs libres et très autonomes
Pour ce faire, l'entreprise mise sur des clients agriculteurs aussi indépendants qu'elle, comme le confirme Laurence Gosseaume : « Chez nous, le client est libre, il choisit, il arbitre, on ne lui impose rien. Ce sont des agriculteurs très autonomes et gestionnaires qui souhaitent que nous répondions à toutes leurs demandes. » Fini alors le discount pur et dur, l'heure est depuis plusieurs années aux services et ceux-ci sont multiples : conseils sur les itinéraires culturaux (agri-pilote), courtage de grain à la demande, caisse rapide dans tous les magasins, relais pour la fourniture d'analyses de terre et de logiciels agricoles etc. La clé du succès passe donc toujours par les magasins. L'offre y est extrêmement large et la disponibilité comme la réactivité sont de mise pour fournir des produits qui ne seraient pas éventuellement disponibles immédiatement.
Toutefois, les collaborateurs de Phyto Service ne sont pas tous sédentaires et cloués dans leurs magasins. Depuis 2002, le négociant a renoué avec la présence terrain et cinq technico-commerciaux dont un spécialisé en vigne, battent aujourd'hui la plaine.
La vente par correspondance et la vente en ligne ne sont absolument pas envisagées chez Phyto Service qui tient à rencontrer ses clients et à les conseiller « en live ». « Internet est pour nous une bonne vitrine mais la VPC, c'est un autre métier, confirme Laurence Gosseaume. Nous savons, en revanche, très bien attirer les agriculteurs dans nos magasins et les offres, annonces et mailings, on sait faire. » Si aucun nouveau point de vente n'a vu le jour depuis quelques années, l'extension géographique est néanmoins plus que jamais envisageable pour Phyto Service. « Mais nous visons plutôt la reprise d'une activité existante pour y mettre en place notre stratégie. La seule création d'un nouveau point de vente n'est pas à l'ordre du jour, sauf opportunité bien étudiée bien sûr », explique Laurence Gosseaume.
Laurent Caillaud