« La filière légumes est en danger chez nous », annonce Jean-Claude Orhan, administrateur du groupe coopératif breton Eureden, lors de son témoignage dans le cadre de la matinale Eau organisée par La Coopération agricole, le 4 avril. Une filière en danger car l’irrigation ne peut être développée faute de pouvoir aménager des réserves d’eau, notamment en zones humides, les dossiers étant le plus souvent rejetés par l’administration (8 % des dossiers ont abouti depuis 2017).
Une pression sociétale sans relâche
La Bretagne connaît, elle aussi, des difficultés liées au manque d’eau durant les périodes sensibles des cultures, comme en 2022. Ce qui fait dire à Jean-Luc Reigne, DG d’Unicoque : « La moitié Nord nous rejoint dans nos problématiques de la moitié Sud ; nous allons alors pouvoir mieux nous comprendre et travailler tous de façon cohérente. »
Mais la région bretonne se trouve confrontée à une réglementation qui mériterait d’être réajustée et à une pression sociétale sans relâche. Pour preuve, la création d’un collectif anti-bassine dans le Morbihan après les évènements de Sainte-Soline « qui dit se préparer pour que ce type de projet ne soit pas monté dans notre région », précise Jean-Claude Orhan.
Unicoque cultive la sérénité
La coopérative Unicoque connaît plus de sérénité en la cultivant pour la réalisation de ses retenues, comme le fait remarquer Jean-Luc Reigne, avec notamment une spécificité : l’aménagement systématique de zones humides artificielles autour des soixante ouvrages (2,56 Mm3) créés depuis 2009.
Et chez Vivadour, le parti a été pris de participer aux différents « échelons de la démocratie participative avec notre participation au Varenne de l’eau, notre implication dans trois PTGE et des SAGE », relate Frédéric Marcato, son directeur R&D, qui a détaillé également toutes les mesures d’adaptation mises en place par sa coopérative.
Tout en exprimant son inquiétude en regard du Plan eau présenté par le préfet Frédéric Veau à cette matinale. « L’article 11 pourrait entraîner des soucis d’interprétation sur notre territoire. Nous serons très vigilants sur les décrets qui vont sortir. »
Un décret attendu pour les eaux usées traitées
Le comité eau de LCA va d’ailleurs être particulièrement attentif sur la suite donnée à l’annonce de ce plan. Réunissant une cinquantaine de participants, ce comité est coprésidé par Frédéric Marcato et Maurice Lombard (ex-directeur industriel de Cristal Union) pour travailler l’amont agricole et aussi l’aval avec le recyclage des eaux dans les usines qui a été présenté lors de la matinale par Vincent Bartoli (Cristal Union) et Mikael Tournaux (BWT).
D’ailleurs, un décret est très attendu à la fin de ce premier semestre 2023, une fois l’avis de l’Anses exprimé, concernant la possibilité d’utiliser les eaux usées traitées pour les lignes de production.
Travailler à des plans de filière sur la sobriété
« Nous allons aussi travailler à des plans de filière sur la réduction de la consommation d’eau sur l’amont et l’aval, précise Virginie Charrier, de LCA et animatrice du comité eau. Nous sommes dans l’année des compteurs : il va falloir faire un état des lieux, commencer à compter pour établir une année de référence. »
Même si le ministère de l’Agriculture a affirmé que la baisse de 10 % de la consommation d’eau attendue au niveau national pour l’ensemble des usages ne concerne pas l’agriculture dont les prélèvements devraient rester stables (pour permettre de couvrir les nouvelles surfaces à irriguer), la prudence reste de mise comme le fait comprendre Virginie Charrier : « C’est présenté ainsi à l’oral mais dans les écrits du plan eau, ce n’est pas précisé. »